.
Comment prendre la décision audacieuse de quitter son pays natal ?
Avez-vous déjà envisagé de tout quitter pour commencer une nouvelle vie à l’étranger ? Dans cet épisode captivant, nous explorons ce choix audacieux à travers le parcours d’Astrid Moulin, une blogueuse française qui a troqué les paysages pittoresques de l’Ardèche pour la vie trépidante de Toronto, au Canada. Que vous soyez attiré par l’idée d’une aventure internationale ou simplement curieux de connaître les défis et les joies d’une telle transition, cet épisode vous offre un aperçu fascinant de ce que signifie vraiment repartir à zéro dans un nouveau pays.
Astrid Moulin est notre invitée spéciale, une blogueuse française qui s’est fait un nom grâce à son blog « fringinto » une plateforme dédiée à partager son expérience de vie au Canada avec la communauté francophone. Originaire de l’Ardèche, Astrid a d’abord suivi un parcours professionnel classique en France avant de décider de partir pour Toronto dans le cadre d’un Programme Vacances-Travail (PVT). Ce voyage initial l’a menée à découvrir un amour profond pour le Canada, l’amenant à transformer son blog en une ressource incontournable pour les nouveaux arrivants francophones à Toronto. Elle est également chroniqueuse à Radio-Canada, où elle partage ses expériences et conseils pour s’adapter à la vie canadienne.
Dans cet épisode, nous plongeons dans les détails de l’adaptation d’Astrid à la vie canadienne, depuis ses premiers pas à Toronto jusqu’à son acquisition de la résidence permanente et, finalement, de la nationalité canadienne. Elle partage ses réflexions sur les différences culturelles, la richesse de la multiculturalité torontoise, et les défis de se créer un réseau social dans une nouvelle ville. Astrid nous parle également des opportunités professionnelles et personnelles qui se sont ouvertes à elle grâce à son blog, qui est devenu une référence pour les francophones au Canada. Elle évoque la fierté qu’elle ressent d’être ambassadrice de la culture française tout en adoptant une nouvelle identité canadienne, illustrant ainsi comment il est possible de s’épanouir entre deux cultures.
.
.
Chapitrage de l’épisode :
0:00:00 – Introduction à l’épisode
0:00:28 – Présentation de l’invité Astrid Moulin
0:01:49 – Décision de quitter la France pour un PVT au Canada
0:02:41 – Difficultés pour obtenir le PVT et premières expériences au Canada
0:03:16 – Transition vers la résidence permanente et emploi dans les réseaux sociaux
0:03:36 – Pivoter vers le blogging après une fin de contrat
0:04:36 – Importance et impact du blog de Astrid pour les francophones au Canada
0:05:40 – Choix de Toronto et premières impressions de la ville
0:06:40 – Impact de vivre dans une ville multiculturelle
0:08:00 – Défis sociaux de s’installer dans une nouvelle ville
0:08:52 – Opportunités professionnelles grâce au blog
0:09:57 – Acquisition de la nationalité canadienne
0:11:02 – Comparaison des cultures de travail entre la France et le Canada
.
Vous avez le choix, rester dans un petit village de 5000 habitants en Ardèche, avec le petit bruit de la rivière qui coule en arrière-plan, ou se retrouver dans une grande ville du Canada. Nous sommes à Toronto avec notre invitée, Astrid Moulin. Ah bah dis donc, dans ton nom, il y a aussi encore un petit peu de l’Ardèche qui traîne. Astrid, bonjour ! Bonjour.
Oui, c’est vrai que rien qu’avec mon nom de famille, en général, on peut avoir une idée d’où je viens. C’est ça. Tu es sur notre antenne aujourd’hui grâce à l’ambassade du Canada en France qui m’a donné tes coordonnées. Tu es blogueuse. Tu as une frange tout le temps dans tes cheveux, donc quand il a fallu trouver le nom de ton blog, tu t’es inspirée de ça.
Exactement, puisque quand je faisais mes études, mes copains m’appelaient toujours, ils faisaient des blagues avec ma frange. Et quand il a fallu créer le nom en 2014 de mon blog, à l’époque, on ne donnait pas son vrai nom sur Internet, ce n’était pas très bien vu. Et donc, j’ai joué avec ce frange à Toronto, Fringe in Toe. Voilà, Frenjinto, on va en parler dans un instant. Si tu veux bien, on recommence par le début avec l’Ardèche, les études à Montélimar et à Valence.
Tout était fait pour que tu fasses ta petite vie en France. Tu es commercial dans une grande boîte, le train-train, etc. Puis un jour, tu te dis, c’est bien, j’ai appris l’espagnol, je suis un peu nul en anglais. Faudra peut-être que je me perfectionne et tu te lances dans un PVT. La période galère du PVT, programme vacances-travail, t’as pas vraiment envie d’aller en Nouvelle-Zélande ou en Australie, c’est trop voyage, tu voulais plutôt aller découvrir un peu le business, tu choisis Toronto mais c’était pas simple.
C’était pas simple parce qu’en 2014, pour obtenir le PVT, alors dans d’autres pays, c’est beaucoup plus simple parce qu’il y a moins de demandes, mais le Canada, c’est le moment où ça commence à exploser. Les places sont limitées et il faut… En fait, c’est premier arrivé, premier servi avec des serveurs sur Internet qui n’ont pas supporté la demande des Français et donc tout crash. Et là, je me dis, ça va être beaucoup plus compliqué que ce que j’avais anticipé. Finalement, tu obtiens ce PVT, tu pars pour une année, tu apprends l’anglais, tu t’amuses bien, tout se passe bien.
Mais bon, le PVT, c’est un an, donc tu dois rentrer. Retour en France. Mais là, tu diras, j’ai encore envie de Canada. Donc la possibilité de refaire deux ans puisque les règles ont changé. Tu te réinscris et la deuxième semaine, bim, tiré au sort.
Ça, c’était le destin. Et là, je le vois comme un signe et je me dis, bon, je suis supposée être là-bas. Allons continuer cette aventure et puis on verra bien où ça nous mène. Et donc, après quelques mois, j’ai décroché un emploi qui me faisait vraiment vibrer. J’étais vraiment très contente et je me suis dit, bon, c’est un autre signe.
Je suis supposée prolonger. Et donc, on a passé du PVT à la résidence permanente. Alors la résidence permanente, un boulot dans les réseaux sociaux d’un stade de la NBA, t’adores ça, ça se passe très bien et puis un matin t’arrives, on te dit merci, j’ai plus besoin de vous. Exactement. À l’américaine quoi !
C’est vraiment ça ce qu’on voit dans les films, ça arrive en vrai. Vous arrivez, on vous dit il faut aller au bureau des ressources humaines, vous ressortez, vous avez vos papiers sous la main, vous avez rendu votre badge, on vous raccompagne à la porte et on vous dit bon ben on te donnera ton carton d’affaires dans quelques jours. Ah ouais c’est brutal. Qu’est-ce que tu veux ton bureau ? Ouais, tu récupères ton sac et tes clés et puis c’est assez…
C’est vraiment comme on le voit à la télé, c’est pas exagéré pour les films américains. Bon, t’as rencontré l’amour, tu rencontres ton petit copain qui est de Toronto. Au final, tu vas développer ton blog. Te voilà blogueuse aujourd’hui. Tu fais de la radio sur Radio-Canada, donc c’est un média que tu connais.
Donc Radio-Canada, il y a la version francophone et anglaise. C’est ça. Radio-Canada, c’est tout ce qui va être en français et CBC, c’est ce qui va être en anglais. C’est les mêmes bureaux à Toronto, mais c’est juste que c’est deux parties différentes parce qu’ils parlent pas la même langue. Tu as une chronique une fois par semaine et ce blog qui te prend beaucoup de temps parce que tu deviens une référence.
Il y avait, lorsque tu as lancé ce blog en 2014, pas de site d’infos en français pour les arrivants français. T’étais la seule. Exactement, il n’y avait personne qui partageait vraiment la vie comme elle se passait. Parce que vous allez trouver évidemment les documents du gouvernement, mais ça reste très officiel, très scolaire, que là, moi, je leur montrais vraiment ce que je faisais dans ma vie, comme un peu, des fois, quand maintenant je rencontre mes abonnés, ils disent que c’est un peu la grande sœur de la communauté francophone ici parce que c’est assez élargi, c’est pas seulement les Français, c’est toutes les personnes qui parlent français en fait dans le monde. Donc c’est génial parce que ça me donne l’occasion de rencontrer des gens de partout.
Mais c’était vraiment comme ce que je vais pouvoir leur dire, attention, il faut faire vos papiers, il faut vous inscrire au consulat parce que si jamais vous arrêtez quelque chose pour vos papiers. Mais je vais aussi leur dire, c’est là-bas que vous trouvez la meilleure baguette et c’est dans ce resto-là que vous allez manger super bien. Voilà, donc c’est vraiment l’aspect grande sœur à tous les niveaux. Alors c’est vrai que le français, quand il se dit je vais aller vivre au Canada, on le sait, sur notre antenne, c’est très souvent vers Montréal qu’il se tourne. Il se dit c’est facile, ça va être en français, c’est nos cousins.
Voilà. Alors d’abord, même à Montréal, c’est pas si facile que ça. Il y a quand même un choc culturel. Mais vivre sur Toronto, on connaît moins. Qu’est-ce que tu pourrais me dire sur cette ville ?
Pourquoi déjà tu avais choisi cette ville ? Et c’était quoi ta sensation, tes premières impressions quand t’es arrivé ? La première chose, quand il a fallu choisir la ville, quand j’ai eu mon PVT, c’est que je me suis dit que j’avais trois options. C’était Montréal, sauf que mon objectif, c’était d’apprendre l’anglais. Vancouver, mais ça faisait quand même trois heures de plus niveau décalage, donc pour garder le lien avec ma famille, je trouvais que c’était un peu plus difficile.
Et Toronto, c’est la capitale économique. Donc dans ma tête je me suis dit si tu veux des opportunités professionnelles, il y aura plus d’opportunités ici. Ce qui maintenant je peux vous confirmer est vrai. Et ce qui moi me plaît le plus ici c’est le mélange de toutes ces cultures. Il y a plus de 50% de la population à Toronto qui n’est pas née au Canada.
Donc c’est vraiment, vous allez pouvoir rencontrer des gens de partout. C’est incroyable en fait de voir la richesse que ça peut apporter de vivre ensemble, d’apprendre que je crois qu’une de mes plus grosses leçons, c’est de me dire que ma façon de voir les choses, elle est peut-être différente de quelqu’un d’autre, mais ça veut pas dire que l’autre a tort ou que moi j’ai tort. C’est juste qu’on vient d’expériences différentes et qu’on voit les choses différemment, mais par contre, le résultat peut être le même, on a tous raison. Et ça, ça m’a beaucoup aidée aussi dans l’empathie, dans comprendre qu’on ne vient pas tous du même endroit et qu’on n’a pas tous les mêmes attentes et qu’on n’a pas tous la même définition de certaines choses. Donc ça, c’est la multiculturalité qui est très difficile à dire pour moi, pourtant j’adore ça, qui est pour moi l’une des raisons principales pour laquelle on devrait venir à Toronto.
Alors plein d’infos pratiques sur le blog, la vie quotidienne, se créer du réseau. Quand on arrive, on est tout seul. Il faut se reconstruire, des amis, etc. C’est pas si simple de débuter dans une grande ville comme ça. C’est pas si simple et je trouve, et après ça fait des années que je suis là, puisque ça fait 9 ans cet été, c’est quelque chose que je vois souvent et que j’ai vécu moi-même, c’est qu’on sous-estime souvent le côté social.
Parce qu’on va avoir plein de choses à faire avant de partir, parce que tout le monde veut nous voir, tout le monde veut profiter avant qu’on déménage. Et puis on part dans un pays où on ne connaît personne. Donc une fois qu’on a fait les papiers, qu’on a trouvé un appartement, qu’on a trouvé un boulot, on se dit mais non, j’ai pas d’amis en fait. Comment on se fait des amis ? Parce que mes amis, dans mon pays d’origine, je les ai faits à l’école ou c’était plus organique.
Et là, comment je force un peu les choses pour trouver des gens avec qui faire des choses ? Alors c’est devenu une référence. Tanvi, c’est quand même.
Ça m’a apporté énormément d’opportunités professionnellement, ça c’est clair. Ce n’est pas mon seul revenu aujourd’hui, mais tout ce que je fais aujourd’hui c’est par rapport à ça. Très bien, ça t’a ouvert les portes et donné accès à de quoi en. Vivre, donc c’est quand même plutôt chouette. Voilà ça, et puis les opportunités, les choses que j’aurais jamais pu faire.
Là, en juillet, je suis partie avec l’office de tourisme de Nouvelle-Écosse, justement pour créer du contenu pour faire découvrir aux francophones. Ça, c’est des opportunités qui sont aussi incroyables de voir qu’on peut, à partir d’un blog qu’on avait créé à la base, comme un album photo, de voir aujourd’hui qu’on peut aider des gens, qu’on peut leur ouvrir des opportunités. Ça a dépassé beaucoup plus que ce que j’avais imaginé. Parce qu’au début en 2014, c’était principalement un peu garder le lien avec la famille qui était en France. Tu n’avais pas imaginé que ça deviendrait comme ça une référence sur Toronto ?
Jamais imaginé que j’allais pouvoir aider d’autres personnes. Et c’est génial de réussir à trouver un croisement entre notre passion, parce que moi j’adore créer du contenu, et pouvoir aider des gens. Moi j’adore ce que je fais et ça a du sens pour d’autres personnes. Ce n’est pas toutes les personnes qui peuvent dire qu’elles ont réussi à trouver.
Mais dis donc Astrid, le petit bruit de la rivière d’Ardèche s’éloigne. Si j’ai bien compris, tu étais maintenant de nationalité canadienne. Depuis janvier dernier, je suis officiellement française et canadienne. Je précise française et canadienne parce que j’ai souvent la question. On ne perd pas la nationalité française.
Non, on ne perd pas, on peut avoir les deux, ce qui est génial puisqu’il y a beaucoup d’accords entre la France et le Canada. Je suis officiellement française et canadienne. J’ai pris l’avion il y a quelques semaines pour revenir en France et dans l’aéroport, il aurait fallu me voir à tenir mes deux passeports très fièrement. J’avais envie de les montrer à tout le monde tellement j’étais fière. C’est une étape incroyable.
Quand tu es à Toronto, tu accueilles les français qui viennent s’installer là-bas. Et quand tu es en Ardèche, tu viens avec ton copain et tu fais guide de ce qu’est la France. C’est ça et il est tombé amoureux de la France, il adore la France et c’est aussi pour toutes les personnes qui écoutent et qui peut-être déjà se disent que c’est compliqué d’être dans une relation avec un local quand on déménage dans un pays, c’est hyper enrichissant et quand on le ramène dans notre pays et qu’on le fait goûter, il adore tous les plats, tous les vins que ma famille adore le faire goûter et surtout avec le Canada qui est un pays qui n’est pas vieux, pour lui, de découvrir la France. Mais regarde, c’est vieux ! Il y a de l’histoire.
Il est passionné par ça. Et ça, c’est aussi d’avoir cette opportunité-là, de rencontrer quelqu’un qui apprécie autant mon pays d’origine. Je suis hyper reconnaissante parce que ce n’est pas le cas de tout le monde. Donc ça, c’est vraiment très reconnaissant. Astrid, ma toute dernière question.
On en a parlé un petit peu juste quand on s’est retrouvés pour préparer cette interview. Ça fait presque dix ans que tu as quitté la France. Elle change un peu la France en ce moment ? Quand tu reviens, tu te dis, dis donc, mais qu’est-ce qu’elle a ? Elle est malade ?
Elle n’est pas en forme ? Elle boude ? C’est vrai qu’on sent un gros décalage et le fossé se creuse parce que forcément on n’est pas toujours connecté à tout ce qui se passe au quotidien et on ne le vit pas aussi parce que quand on y va en vacances on est comme un touriste malgré que ce soit ma vie, moi je ne paye pas mes impôts là-bas, je n’ai pas besoin de travailler là-bas donc il y a un gros gros décalage et c’est vrai que Des fois, pas qu’on se pose des questions, mais je suis très très fière d’être française, j’adore ma culture, mais c’est vrai qu’il y a un fossé qui se crée au niveau de la mentalité, même la façon de voir les choses. Et puis, il faut dire honnêtement que travailler au Canada, pour avoir travaillé en France, je préfère travailler au Canada parce que je trouve qu’il y a un peu plus de collaboration que ce que je pouvais trouver en France. Donc voilà, on sent le décalage.
et je souhaite juste à tout le monde qu’il se sente mieux et que ça aille mieux, parce que ça fait toujours mal au cœur en fait. On est un peu tendu ces dernières années, de toute façon l’actu entre, on le sait, on le constate. Moi c’est bien comme ça, après tu rentres à Toronto et puis t’es heureuse. Moi je suis contente, c’est le meilleur des deux mondes. C’est la meilleure des deux mondes.
Ma bonne culture française, ils sont hyper fiers. Et ça, je le répète parce que souvent, on pense que quand on habite plus loin, on n’est pas fiers, mais on est fiers. Tous, autant les uns que les autres, on est les ambassadeurs de la France. C’est-à-dire aux gens, allez-y, allez en vacances en France, c’est beau, mais n’allez pas qu’à Paris, allez dans les petits villages. On est les ambassadeurs parce qu’on a un pays merveilleux.
Ce n’est pas parce qu’on a des loins qu’on n’aime pas notre pays. Ce sera le mot de la fin. Le lien pour découvrir ton blog est dans ce podcast si vous allez vous installer là-bas. Passage obligé. Merci Astrid.
Merci beaucoup pour ton accueil.
.