Paul Pierroux-Taranto : Entre panique et solidarité en Espagne

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Comment réagiriez-vous si, en plein milieu d’une conversation téléphonique, tout s’arrêtait brusquement ?

Imaginez-vous en train de déambuler dans les rues de Barcelone, tandis que votre interlocuteur est coincé dans un ascenseur. Une panne générale plonge la ville dans le silence, suscitant la confusion et la panique parmi les habitants et les touristes. C’est exactement ce qui s’est passé lors de cet événement inattendu dont nous discutons aujourd’hui avec notre invité.

Paul Pierroux-Taranto, rédacteur en chef « Le Petit Journal » en Espagne, est notre témoin privilégié pour cet épisode. Connu pour ses reportages récent sur les innondations à Valence, Paul nous raconte comment il a navigué à travers le chaos de Barcelone, cherchant à comprendre et à informer sur la situation.

Dans cet épisode spécial, nous explorons les conséquences d’une panne d’électricité à grande échelle qui a paralysé non seulement Barcelone, mais également une partie de l’Espagne et du Portugal. Paul nous décrit la solidarité qui s’est manifestée parmi les gens, les défis rencontrés sans technologie moderne, et l’importance cruciale de la radio comme seule source d’information. Alors que le réseau électrique et les transports reprennent lentement, cet événement nous rappelle notre dépendance à la technologie et la résilience humaine face à l’incertitude.

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Podcast n°2499 enregistré le mardi 29 avril à 11h Paris Time produit par Francaisdanslemonde.fr: Radios & podcasts pour les Francophones qui se préparent ou qui vivent la mobilité internationale. Appli mobile gratuite disponible pour Android & Apple, recherchez FRANCAIS DANS LE MONDE.

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Chapitrage de l’épisode :
0:00:05 – Introduction et situation initiale
0:00:21 – Annonce de la panne générale
0:01:10 – Première prise de conscience de la coupure
0:02:09 – Réactions et spéculations sur la nature de la panne
0:03:26 – Tentatives de communication et recherche d’information
0:05:00 – Recherche de solutions et déambulation en ville
0:05:49 – Entrée au Palais de la Generalitat
0:06:50 – Solidarité dans la rue
0:07:50 – Importance de la radio pour les informations
0:08:50 – Retour progressif à la normale
0:09:47 – Conclusion et remerciements
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Transcription IA de l’épisode :

Vous êtes en train de vous promener dans les rues de Barcelone lorsque vous êtes au téléphone avec votre femme qui est elle-même dans un ascenseur et puis tout s’arrête. À un moment, c’est une panne. Est-ce que c’est une panne de téléphone ? Est-ce que c’est une panne d’électricité ? Est-ce que c’est une panne dans le quartier ?
Eh bien non, ce sera une panne générale qui va engendrer un vent de panique. On en parle avec notre témoin, Paul Pierroux-Taranto, le petit journal Valence, qui est avec nous. Décidément, Paul, tu sais que tu es le monsieur des catastrophes. La dernière fois qu’on a échangé, c’était suite aux inondations à Valencia. Oui, c’était vraiment impressionnant, je peux te le confirmer.
Alors justement, je racontais ce moment où toi, tu es au téléphone avec madame, tu es au moment où ça se passe à Barcelone. On ne comprend pas dans les premières minutes, on ne comprend pas ce qui se passe. Exactement, j’étais au téléphone avec ma femme, tout se passait bien, une conversation normale. Et d’un seul coup, j’entends ma femme qui dit il y a une coupure d’électricité. Je suis dans l’ascenseur.
Moi, c’est ce que j’ai compris. Elle n’était pas dans l’ascenseur, en pensant qu’elle était dedans, coincée. Et voilà, le portable se coupe, je regarde autour de moi et très vite je comprends qu’il se passe quelque chose, puisqu’en jugé par les regards un petit peu aiguris des passants devant leur portable, je me dis qu’il y a une coupure générale du réseau mobile. Mais je n’ai pas tout de suite compris qu’il s’agissait d’une coupure électrique, Et ça, c’est arrivé après. J’ai vu en parlant avec des gens autour de moi, je leur ai dit non, non, écoutez, ça ne concerne pas que le quartier.
Moi, j’étais avec ma femme au téléphone qui était à Valence. Là, je suis à Barcelone. Donc, il y a forcément quelque chose qui concerne au moins une partie de l’Espagne. Et en fait, il y a eu une espèce de silence d’un coup d’un seul dans toute la rue. Et là, j’ai compris qu’il s’agissait d’une coupure d’électricité et je ne te le cache pas, j’ai paniqué.
Alors, le silence dans une ville comme Barcelone doit être en effet surprenant. Et puis, on vit dans des temps un peu incertains. Je suppose que le cerveau se met à imaginer des scénarios. Tu parlais attentat, guerre. Enfin, tu sais pas.
Oui, oui, j’ai une petite tendance à la paranoïa, tu me diras. quelque peu corroboré par l’actualité. Et donc, en effet, j’ai pensé d’abord à un attentat, en fait, dans ma tête. En tout cas, c’était un scénario catastrophe parmi d’autres. Ensuite, évidemment, je me suis dit, il y a peut-être, je ne sais pas, moi, ça va peut-être te paraître fou, mais il y a une bombe, quelque chose, la Russie.
Tu vois, j’ai commencé à m’imaginer des tas de scénarios catastrophes. Et finalement, ce qui s’est passé, c’est que vers 13h, j’ai plus les horaires exacts en tête, Il y a eu une espèce, j’ai compris que le réseau fonctionnait, le réseau mobile fonctionnait encore avec la France. J’ai deux cartes cibles, je ne vais pas rentrer dans le détail. Donc j’ai appelé un ami, j’ai eu ce réflexe et je me suis dit, on n’a aucune information ici à Barcelone parce que tout est coupé, tout est down. Mais si je parle à un ami qui est en France, et heureusement il m’a répondu, il pourra regarder sur Google et voir s’il y a eu un attentat.
Donc j’ai parlé à un ami, mais la communication était très mauvaise. On entendait très mal, mais j’ai réussi quand même à parler avec lui 3 minutes. Il m’a dit, écoute, il n’y a rien pour l’instant. Il n’y a absolument rien. Ah si, attends, je regarde, il y a un article, je ne sais pas, peut-être, apparemment, il y a une panne, je ne sais pas quoi.
Je ne comprends pas l’espagnol. Et puis hop, ça s’est coupé. Et là, voilà, donc si tu veux, bon, il y a eu, j’étais un peu rassuré parce que je me suis dit, bon, c’est un truc, il n’y a pas eu de bombe et apparemment, enfin voilà. Et ensuite, j’ai eu un réflexe un peu journalistique. c’est que j’ai appelé, j’ai réussi à recontacter les personnes de Radio France et je crois que je leur ai donné la primeur de l’info sans m’envoyer des fleurs mais voilà donc ils n’en croyaient pas à leurs oreilles et voilà et je suis passé je crois à deux directs hier sur France Inter et ensuite mon réflexe ça a été d’aller en fait près des officiels Vraiment un réflexe journalistique, je me suis dit, pour avoir le plus d’informations possibles, il faut que je me rapproche des officiels.
C’est là qu’a commencé une déambulation, je dirais, dans les villes de Barcelone, sans Google Maps. Et je t’avoue qu’on se rend compte à quel point on est dépendant, je suis dépendant de l’Internet, c’est-à-dire que je ne me repérais plus, j’étais en plus un peu en état de panique. Les gens dans la rue, il faut imaginer, je veux dire, j’étais dans une rambla dont je ne connaissais pas Barcelone, c’est vraiment touristique. Il y avait des coréens qui étaient là, complètement désemparés. Des policiers, je parlais à des policiers qui utilisaient simplement leur talkie-walkie, qui n’avaient pas plus d’informations que moi.
Et ils m’ont indiqué le palais de la Généralitat, donc la Généralitat c’est le gouvernement régional. Et je suis allé là-bas. Et en montrant ma carte de presse, je suis entré dans le palais de la Généralitat, la partie de la communication.
et je suis resté là plusieurs heures, dans une cellule de crise en fait, au premier horloge, et j’ai pu recharger mon portable. Parce que dans l’anecdote, j’avais absolument plus de batterie, il me restait 10% de batterie. C’était ça qui m’inquiétait le plus. Alors c’est vrai qu’il faut imaginer à un moment précis, tout s’arrête. Ceux qui sont dans les métros se retrouvent sous terre, dans le noir.
Ceux qui étaient dans un manège, j’ai vu cette vidéo, étaient coincés à 40 mètres de haut. Les trains se sont arrêtés brutalement. Forcément, il n’y a plus d’informations. On ne sait pas ce qui se passe. Contrairement à ce qu’on dit toujours que Quand quelqu’un dit quelque chose, toute la planète le sait immédiatement.
Eh bien, contre toute attente, la preuve est que non, lorsqu’il n’y a plus d’électricité, on n’a plus rien. Cette panique, elle s’est calmée. Il y a eu discussion avec les gens dans la rue. Comment tu as pu ressentir les choses dans les premières heures ? Alors, écoute, moi, ce qui me frappe.
C’Est vraiment une solidarité que j’ai retrouvée dans un style différent, bien sûr, J’ai retrouvé un peu cet esprit de solidarité qui a eu lieu pendant la Dana, la catastrophe naturelle à Valence, justement, tu en parlais en introduction. Donc il y avait vraiment une entraide, les gens se parlaient, j’ai fait des rencontres complètement improbables, complètement surréalistes dans la rue. On sentait bien qu’il y avait quand même un vent de panique, il faut bien le dire. Mais en même temps, tu vois, pour l’anecdote, j’ai rencontré une sur le chemin, comme ça, en cherchant la Generalitat. Je me suis trouvé un skipper à GPS, une petite dame catalane de 70 ans qui semblait complètement perdue.
et je lui ai parlé avec elle spontanément, tu vois, et je lui ai dit, accompagnez-moi, vous allez m’aider à trouver ce Palais de la Généralitat et vous allez rester avec moi. Et en fait, grâce à elle, d’abord, je me suis beaucoup mieux repéré dans les rues de Barcelone, parce qu’évidemment, c’est une femme qui a toujours vécu à Barcelone. Et ensuite, à Barcelone, je ne t’apprends rien, on parle catalan aussi, il y a des personnes qui préfèrent parler catalan plutôt qu’espagnol. Donc voilà, j’étais vraiment avec une personne qui était une locale et qui m’a beaucoup aidé en fait dans mes démarches. Et voilà, pour te répondre plus concrètement ensuite, je sortais régulièrement de la Généralitat pour parler d’abord aux policiers, pour parler à des touristes, pour parler à des gens, j’étais vraiment dans le centre.
Et voilà, on essayait tout d’avoir des informations, tout le monde écoutait la radio, des gens se sont rués sur des radios avec piles pour essayer d’avoir… Donc il y a eu ce réflexe d’écouter la radio. C’était la seule source d’informations. Et je peux t’assurer que personne n’avait, d’ailleurs moi j’étais au contact des journalistes, personne n’en savait plus que les passants de l’Equidam dans la rue. Alors Paul, il est 11 heures du matin, nous sommes le 29 avril 2025, au moment où on enregistre.
Toi, t’es dans la rue, encore en ce moment, t’es en transit, t’es en train de revenir à Valence. Tu as pris quelques minutes pour parler avec la radio des Français dans le Monde. Comment ça se passe maintenant ? Est-ce que les choses sont reparties ? Je suppose qu’il y a quand même une remise en route, notamment des réseaux de transport.
Tout à fait, alors il y a une remise en route progressive. Je sais, par exemple, que pour les lignes à longue distance, ça refonctionne. Là, je suis à la gare de Barcelona Sands, donc là, à la gare de fin. Voilà. Et j’avoue que je n’ai pas toutes les informations encore, mais j’espère bien pouvoir rentrer cet après-midi ou même ce matin à la balance.
Et ensuite, ce que je peux te dire, c’est que le système est revenu. Le réseau, tout le temps, fonctionne. Par exemple, j’ai un collègue qui est à Malaga en Andalousie et on échange sur un groupe WhatsApp. Lui me disait que ce matin, il y a encore une heure, il n’avait pas d’électricité. On sent que c’est progressif, c’est graduel concernant les transports.
Oui, forcément, il y a encore beaucoup de chaos et d’incertitudes. Alors, on rappelle que ça a également touché le Portugal. On a une pensée pour tous les Français établis en Espagne et au Portugal pour cette panne tout à fait inédite. On ne sait pas encore pourquoi elle a eu lieu à suivre donc, mais on voulait te retrouver pour que tu puisses témoigner directement sur le terrain. Merci, Paul, pour cette intervention.
Bon courage pour ton retour. Ça va, Madame n’était pas dans l’ascenseur, donc tout s’est bien passé pour elle. Exactement. Bon, très bien. Merci, bon courage et à très vite.
Merci Gauthier.
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