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Comment une athlète championne devient-elle une icône de la musique ?
C’est la question intrigante que l’on pourrait se poser en découvrant le parcours fascinant de Princesse Erika, invitée de cet épisode du podcast « 10 minutes, le podcast des Français dans le Monde ». Erika, née à Paris de parents camerounais, a grandi dans une famille où la musique et la culture étaient omniprésentes. Sa mère, la première femme d’Afrique subsaharienne à avoir écrit un livre, et son père, musicien amateur, ont sans doute influencé sa carrière artistique. Cependant, avant de se lancer dans la musique, Erika a brillé dans le sport, remportant le championnat de France de course de haies et de saut en longueur en 1979. Elle explique comment cette expérience sportive a forgé son mental et sa détermination dans le milieu musical.
Princesse Erika, de son vrai nom Erika Dobong’na, est une artiste aux multiples talents. Connue pour avoir popularisé le ragga en France dans les années 80, elle est aussi une pionnière de la scène urbaine française. Son titre emblématique « Trop de blabla », sorti en 1988, l’a propulsée sur le devant de la scène musicale. Au cours de sa carrière, elle a collaboré avec des artistes de renom tels que Catherine Ringer, Jean-Louis Aubert et Marc Lavoine. Erika évoque avec émotion ces rencontres et les souvenirs qu’elles lui ont laissés, tout en soulignant l’importance de rester fidèle à soi-même et de persévérer malgré les obstacles.
Dans cet épisode, Erika partage son projet de donner une nouvelle vie à son célèbre titre « Trop de bla bla » en le remasterisant pour le rendre disponible sur les plateformes numériques. Elle explique que cette démarche est un cadeau pour ses fans qui n’avaient plus accès à cette chanson culte. L’épisode aborde également ses projets actuels, dont la préparation d’un nouvel album, ainsi que ses expériences dans le théâtre, le cinéma et la radio. Erika conclut en racontant l’origine de son nom de scène, « Princesse Erika », en hommage à sa mère, véritable princesse d’une lignée traditionnelle camerounaise. Un épisode riche en anecdotes et en inspirations pour tous les auditeurs.
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Chapitrage de l’épisode :
10 minutes, le podcast des Français dans le Monde.
Et bien en direct de Montreuil, mesdames et messieurs, on part retrouver Princesse Erika. Bonjour à tous et merci de me recevoir Gauthier, c’est un plaisir. Je suis très content d’échanger avec toi. La vie nous réserve des surprises et tu as décidé de donner justement une seconde vie à un titre que tout le monde connaît. Alors est-ce que tu veux bien qu’on commence à replanter un tout petit peu le décor déjà ?
Absolument ! Allez c’est parti ! Tu es née à Paris, tes parents sont camerounais et une famille de musiciens comme tout le monde a tendance un petit peu à chantouiller. Tout le monde a tendance à grattouiller, chantouiller, compositer. Tout le monde aime bien…
Ma mère était quelqu’un qui écrivait. C’était une écrivaine, je dirais même. Une des premières femmes, la première femme à avoir écrit un livre, la première femme d’Afrique, à avoir écrit un livre à 16 ans. Et mon père était un musicien, dans le sens, par plaisir. C’est-à-dire qu’à la maison, il y avait toujours des guitares.
Ça chantait, c’était super agréable. Mais c’était aussi, ils avaient des métiers, c’était des sociologues, psychosociologues. Donc une famille très intello, en fait, quelque part. Et oui, très musicienne. Paradoxalement, t’aurais pu être une championne d’athlétisme.
Ça, j’ai découvert. En 79, tu remportes le championnat de France pour la course de haies et saut en longueur radicalement différent, quoi. Mais si, c’est pareil. Parce que si tu veux ce métier, c’est pas une compétition contre les gens, mais c’est avec toi. C’est-à-dire qu’il faut que tu sois endurante.
Il faut que tu sois rapide à des moments. Il faut que tu sois souple. Il faut que tu acceptes la défaite. Il faut avoir un mental de sportif. Je pense que ça m’a énormément aidé dans ce métier.
J’avais pas vu ça comme ça, mais maintenant que tu le dis, en effet, c’est franchir un certain nombre d’obstacles que d’être chanteur. Absolument. Il y a parfois des obstacles difficiles. Tu commences avec tes sœurs, avec plusieurs groupes, plusieurs expériences de scène. La scène, on apprend vite et beaucoup quand on travaille avec les autres et qu’on a du public en face de soi.
C’est très formateur. Absolument c’est ce formateur et tu sais quand j’ai commencé j’ai commencé avec mes soeurs donc à la maison et tout on avait déjà notre petit public quand on chantait en famille on avait déjà nos gens qui nous disaient elles sont mignonnes voilà donc on a toujours aimé faire le spectacle on a toujours aimé faire le show et chanter avec mes soeurs c’était une école d’abord super chanteuse. J’avais aussi une mère qui chantait. Enfin, pour nous, c’était absolument naturel de faire ça. On ne se trouvait pas…
Voilà, ce n’était pas exceptionnel de se… Et là, je vois, on a gardé ça parce que nos enfants, qui sont aussi très musiciens, quand ils viennent à la maison, tu mets la guitare, le piano et tout. Des fois, je suis là, il est deux heures du matin, je dis mais rentrez chez vous, les gars. Qu’est-ce qu’ils se… Tu vois, on aime ça.
On aime se réunir et chanter. En 88, alors pour le coup je vais raconter ma petite histoire, moi j’étais allé acheter ton 45 tours chez un disquaire, le titre s’appelle « Trop de blabla », c’est comme ça qu’on te découvre et puis ça rentre au top 50, alors ça veut dire le clip, ça veut dire les plateaux télé, les tournées promotionnelles. Qu’est-ce que tu retiens de cette année 88 ? Écoute, ça a été assez… Parce que moi, le titre, je l’ai enregistré en 86.
En 86, je pars à Londres et tout, je rencontre mes gars à SWAD. On joue, on enregistre deux titres d’ailleurs. Et je rentre à Paris et là, je commence à faire, tu vois, le tour des maisons de disques. C’était ma première intrusion dans le milieu. Tout le monde me le jette à la gueule.
Tout le monde. Ça ne marchera pas. Merci, repars avec ton titre. On part avec ton truc. Et donc le temps passe et un jour, il y a quelqu’un qui me propose de mettre sur une compilation.
Je te jure, les mecs qui me l’avaient jeté à la gueule, ils se sont dit, je le veux, je le veux en single. Ils m’avaient fait l’embarras du choix. C’était dingue. Donc moi, ce que j’en garde comme souvenir, c’est de jamais perdre sa foi. C’est-à-dire que ce que tu crois qui est bon, c’est bon.
Ce que tu crois qui est bien, c’est bien. Après, il y a la production, il y a des machins. Tu vois, il y a des choses qui viennent s’ajouter, mais le fond de toi-même, tu le connais mieux que personne. C’est une belle leçon, ce que tu nous dis là. Tu ramènes le ragga en France.
C’est Wikipédia qui le dit. Tu contribues à la popularité du ragga en France et tu es pionnière sur la scène urbaine dans les années 80. Ça te fait quoi d’entendre un truc pareil ? Je dirais que quand je suis arrivée en 88 dans les médias, les radios et les télés, je me sentais toute… Je me sentais bien parce que j’ai ma petite personnalité, ma petite originalité et je la connais bien.
Donc, je n’étais pas distante avec mon reggae. Je trouvais que le public français m’a énormément accueilli avec tout l’amour du monde. Les artistes français m’ont tout de suite invité à faire des duos. Je me suis dit que ça m’a fait plaisir de contribuer à ça. Je ne me suis pas sentie l’âme d’une pionnière, comme on peut dire, mais surtout quelqu’un qui arrive avec quelque chose qui lui est propre et qui est accepté par les autres.
J’ai trouvé ça super. Les années 80 et les années 90, tu rencontres plein de gens, mais ça fait rêver. Tu chantes avec Catherine Ringer, tu bosses avec Jean-Louis Aubert, il y a Marc Lavoine. Ça doit être des sacrés souvenirs. Tu dois avoir dans ta mémoire des moments un peu inoubliables.
Avec Marc, c’était particulier parce que Marc, je l’ai rencontré avant Trou de Blabla. C’est-à-dire que Marc, il était réalisateur de projet pour son producteur. et puis ils nous ont appelé pour faire des chœurs pour Patti Lane sur « Déshabillez-moi » en reggae. Donc on est arrivés et comme on est arrivés, j’ai commencé à… Après j’ai été enregistré sur Blabla, on est resté proche et il écoutait, il disait à Pierre-Alain, son producteur, « Pierre-Alain, il faut que tu sortes ce truc !
» à fond derrière moi. C’est une des personnes dans ce milieu que j’aime toujours pour ça. Parce que lui, il m’a connu avant. Il m’a encouragé. Et après, évidemment, il m’a appelé pour faire un duo parce que c’était normal.
Mais avant tout ça, il avait déjà fait tout ça. Pour moi, c’est un être exceptionnel. En 96, il y a « Faut. Que je travaille ». Alors, il faut que tu travailles.
On se rend compte que quand même, les années passent. On a moins entendu Princesse Erika depuis. Il faut que tu travailles, princesse. Je travaille. Alors après, il y a ce qu’on appelle les tubes que tu connais.
Il faut que je travaille, c’est ma vie, etc. Mais il y a les albums parce que je n’ai quand même pas rien fait. J’ai fait des albums. Là, je suis en train de Pour préparer un nouvel album. Dans la meuse d’abord, et puis avec plein de partenaires, on travaille sérieusement pour justement arriver avec quelque chose qui soit irréfutable.
On prend du temps, entre temps j’ai quand même fait du théâtre, j’ai fait de la radio, j’ai fait du cinéma, j’ai fait des séries, j’ai bossé gars, j’ai bossé grave ! Eh ben très bien, c’est l’essence. Attention, je surveille. Pourquoi avoir décidé de remasteriser et de ressortir Trop de blabla ? Alors, tu sais pourquoi ?
Parce que ce titre-là n’existait pas sur les plateformes. Ah ouais ? On ne le trouvait pas. C’est-à-dire que comme il n’était pas numérisé, tu ne le trouvais pas. C’est-à-dire que les producteurs, comme moi, puisque moi je suis producteur de Trop de blabla, on a sorti ce titre-là en 88.
Il n’est jamais ressorti après. il a été sur des compiles mais jamais il n’a été numérisé. Donc je me suis dit que si tu ne l’as pas acheté comme toi ou si tu regardes le clip, à moins de regarder le clip, tu ne l’as pas dans tes playlists. J’ai trouvé que pour les gens qui m’aimaient, c’était quand même la moindre des choses de leur donner. Donc on l’a numérisé, on l’a remasterisé et le voici.
C’est vraiment pour les gens qui m’aiment parce qu’il n’est même pas à la vente. C’est vraiment juste pour que les gens puissent la voir et l’écouter chez eux tranquille. Princesse Erika, un sacré nom d’artiste quand même. C’est quoi cette histoire de princesse en vrai ? Tu connais pas ?
Bah non, mais dis-moi parce que t’es une vraie princesse, parce que sinon je dis vous. Tu peux me dire vous si tu veux. Ah zut ! C’est maintenant que tu le dis ! Non, en fait, c’est-à-dire que la vraie princesse, c’est ma mère.
Mais réellement, c’est-à-dire que ma mère, c’était la fille d’un chef, un chef traditionnaliste, c’est-à-dire un chef de père en fils, avec des armoiries, avec des us et des coutumes, et avec surtout pas un droit de vie et de mort sur ses… C’est comme un maire de village, c’est-à-dire qu’il célébrait les mariages, les décès, les conflits. Donc, ses fils et ses filles étaient des princes et des princesses. Et il se trouve que maman, elle était, comme je dis, en plus la première femme de l’Afrique subsaharienne à avoir sorti ce livre. Donc, elle a voyagé, elle a été très mise en avant.
Donc, on l’appelait princesse. mais c’était une réalité. Mais elle, après, elle s’est installée en France et elle a fait ses enfants, et donc elle a perdu le titre d’une certaine manière. Donc moi, quand j’ai commencé à faire du reggae, il y avait aussi tout ce truc, tu vois, Prince Farrah, Queen Omega, enfin, tu vois, il y avait plein de gens qui avaient des noms comme ça un peu, et je me suis dit, mais moi, princesse, ça serait vrai, parce que je suis la fille d’une princesse, donc je peux prendre le titre. J’ai été demander à ma mère, elle m’a dit, vas-y, fais.
Eh bien, chère princesse, veuillez accepter toutes mes plus plates excuses. Je ne vous ai pas vouvoyé. Je me courbe devant vous et très heureux. Il y avait quand même un truc très marrant. Quand j’étais petite, quand je voyais des gens venir à la maison, je voyais que quand ils parlaient à maman, ils se couvraient la bouche comme ça.
Ils lui parlaient comme ça. Quand ils venaient du village ou qu’ils venaient vraiment de pas les potes.
J’ai dit à maman, mais pourquoi ils font ça, maman ? Pourquoi ils te parlent avec la bouche, la main devant la bouche ? Elle me dit, parce qu’il ne faut surtout pas que leur haleine m’atteigne. C’était déjà très pro-Covid, finalement.
Princesse Erika sur la radio des français dans le monde. Ton titre va être diffusé à partir dans 20 secondes dans tous les pays du monde et on va le retrouver avec un vrai plaisir. Merci d’avoir accepté cette invitation. Merci à toi. Merci beaucoup.
Je vous souhaite à tous une excellente journée.
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