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Comment l’identité et les expériences façonnent-elles notre vision du monde ?
Enregistré à Paris dans le studio de La radio des Français dans le monde installé aux 13émes Trophées des Français de l’étranger organisés par Lepetitjournal.com, nous explorons une question fondamentale : comment notre identité et nos expériences influencent-elles notre perception du monde ? À travers l’histoire fascinante de notre invitée, nous découvrons les défis et les opportunités uniques que présente la vie d’expatrié. Comment se réinventer dans un nouveau pays tout en préservant ses racines culturelles ? C’est ce que nous allons découvrir aujourd’hui.
Notre invitée, Pom Madendjian, est une expatriée française qui a passé presque toute sa vie à l’étranger. Née à Paris, elle a été expatriée dès ses quinze jours et a vécu dans une dizaine de villes à travers le monde, dont l’Arabie Saoudite, le Yémen, et Kuala Lumpur. Passionnée par la culture et la francophonie, Pom est guide au musée national de Kuala Lumpur, auteur d’un roman, et rédactrice en chef d’un journal en français en Malaisie. Elle a également fondé le Festival international des auteurs francophones en Malaisie, qui a connu un succès retentissant.
L’épisode se concentre sur l’importance de la francophonie et de la culture française à l’étranger. Pom partage sa vision de l’expatriation comme une opportunité de promouvoir la culture et les valeurs françaises, tout en s’intégrant dans des contextes culturels diversifiés. Elle évoque ses expériences dans différents pays, les défis rencontrés, notamment en termes de sécurité et de liberté d’expression, et comment elle a su transformer ces défis en opportunités. À travers ses initiatives culturelles, elle souligne l’importance de créer des ponts entre les cultures et de célébrer la diversité linguistique et culturelle.
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Chapitrage de l’épisode :
Il y a une première à tout, c’est ma première pomme au micro de la radio des français dans le monde. Bonjour et bienvenue. Bonjour Gauthier, merci. Donne-moi ton nom de famille, s’il te plaît, je vais dire une erreur. Madène-Géant.
Madène-Géant. Pomme, c’est un choix de papa-maman qui n’a pas été simple pour le faire enregistrer. On peut dire ça, oui. Il a même été refusé par l’officier d’état civil. À l’époque, voilà, ça se faisait.
Alors, je pose régulièrement la question à mes invités. D’où viens-tu en France ? Alors là, tu m’as regardé en disant, oh là là, c’est compliqué. Tu es une expatenée. Oui, souvent c’est compliqué de répondre pour nous à ces questions parce que je suis née à Paris, c’est vrai, mais j’ai été expatriée depuis mes quinze jours.
Voilà, jusqu’à mes 18 ans. Après, je suis rentrée en France faire mes études et travailler une dizaine d’années dans les médias et la publicité. Et je suis repartie cette fois en tant que conjoint accompagnante d’un expatrié. Il y a presque 15 ans maintenant, donc ça fait presque 30 ans à l’expatriation. Et ça fait une dizaine de villes différentes, des cultures différentes, des langues différentes.
Absolument. Fais-moi un peu voyager dans tes expatriations du coup. Alors en tant qu’enfant, j’ai été expatriée en Arabie Saoudite, au Yémen, au Vanuatu qui est une petite île que personne ne connaît au fond du Pacifique. J’ai été aussi au Luxembourg, au Liban. Et aujourd’hui tu as posé tes bagages à Kuala Lumpur, alors c’est monsieur qui a trouvé un travail là-bas, tu es donc conjoint accompagnateur comme on dit sur la radio des français dans le monde, et toi toujours passionné de culture, de francophonie aussi.
Tu as plusieurs casquettes, alors le matin quand tu pars travailler, tu choisis la casquette du jour. C’est ça, quand je me regarde dans la glace. Non, effectivement, j’ai trois casquettes. Alors, on va commencer par la casquette, entre guillemets, qui me prend le moins de temps. Je suis guide au musée national de Kuala Lumpur.
Alors, je ne sais pas si tu sais, Gauthier, mais en Asie, il y a beaucoup de pays qui proposent un système formidable. J’en profite juste pour en parler parce que c’est vraiment intéressant. Les musées nationaux proposent une formation gratuite sur une année et en échange en fait les personnes qui ont été formées gratuitement donnent deux années minimum de leur temps pour une visite par mois dans leur langue d’origine pour le musée. Donc en fait tout le monde y gagne et les touristes qui ont la chance d’avoir une visite dans leur langue et le musée qui a plein de guides dans plein de langues différentes et bien sûr ceux qui apprennent. Alors tu es aussi auteur, tu as sorti déjà un premier roman.
Absolument, ça remonte un petit peu maintenant, c’était en 2018. Mais oui, c’est ce qui a commencé à faire, en fait, que j’ai voulu construire ma carrière depuis une dizaine d’années autour de la culture. Donc, j’ai commencé par éditer ce premier livre qui s’appelle La folle aventure d’une mère de jumeaux. Ensuite, effectivement, je me suis lancée dans les voyages culturels à l’époque où j’habitais en Afrique du Sud. Puis, j’ai lancé le premier salon du livre en français à l’époque où j’habitais au Vietnam, à Ho Chi Minh.
Et comme ça a été un joli succès, lorsque je suis arrivée il y a deux ans et demi en Malaisie, je me suis dit et pourquoi pas ? Et si en Malaisie aussi il y avait le potentiel pour faire ça ? Donc je me suis renseignée et effectivement je me suis rendue compte qu’il y avait à peu près 20 000 locuteurs en langue française en Malaisie, ce qui est étonnant puisqu’il n’y a aucun lien entre la France et la Malaisie au départ historique. Donc des gens qui sont très motivés par cette langue et là je me suis dit voilà il y a la place aussi pour un salon là-bas donc je l’ai lancé l’année dernière avec une autre de mes casquettes puisque je suis responsable Asie d’un très beau réseau littéraire francophone qui s’appelle Rencontres des auteurs francophones et donc ce salon qui s’appelle le Festival international des auteurs francophones en Malaisie a eu sa première édition l’année dernière en mars avec plus de 800 visiteurs et plus de 2000 livres vendus donc c’était un test et c’est un test qui a été finalement très réussi donc deuxième édition la semaine prochaine ! Alors Pomme, tu as plusieurs casquettes et moi je te tire mon chapeau pour ce festival.
Attends, attends, j’ai même pas fini parce que j’ai encore une autre casquette, je t’en ai pas parlé. Mais je suis aussi rédactrice en chef de La Gazette qui est le seul journal en français de Malissie. Voilà, le tour est fait. C’est complet. J’ai fait ma fiche CV qui fait 8 pages.
Grâce à ce festival international des auteurs francophones en Malaisie, on dirait le nom de la radio, c’est aussi court que nous, tu es lauréate à l’UMI des lycées français du monde, tu rafles ce prix, lauréate 2025. Quand tu as appris, tu étais où ? Qu’est-ce qui s’est passé dans ta tête ? J’Étais dans la cuisine en train de préparer le dîner de mes jumeaux et Damien m’a appelé en me disant voilà tu as gagné ce prix et c’est vrai que je suis un peu tombée des nues j’avoue parce que j’avais déjà eu la chance merveilleuse de recevoir le prix culture art de vivre pour l’ASEAN des français de l’étranger en décembre dernier donc là recevoir un deuxième prix j’avoue que ça m’a vraiment soufflé je suis de reconnaissance infinie envers le petit journal. Et le jury On parlait avec Hervé de ces Français qui vivent à l’international, qui font briller notre culture.
Toi, tu es passionné de culture et de francophonie. Ça te semble important en tant que Française d’arriver dans un pays et de faire battre notre drapeau culturel, notamment sur le pays en question, en l’occurrence la Malaisie. Écoute, ça dépend comment c’est fait. Il n’y a bien sûr aucune arrière-pensée post-coloniale bizarroïde en jeu. C’est bien de le rappeler.
Voilà, c’est pas du tout le cas. C’est simplement que quand on partage la francophonie, c’est aussi partager des valeurs, c’est aussi partager toute une littérature des penseurs, des gens qui ont réfléchi dans cette langue. Et c’est pas pour rien d’ailleurs qu’on a autant de gens qui apprennent le français dans le monde. Donc effectivement, je le fais avec grand plaisir, avec fierté. Et je rencontre souvent des gens qui sont vraiment très intéressés, tout à fait passionnés.
Et c’est pour ça que ça fonctionne, parce que s’il n’y avait pas de demande, je n’irais nulle part. On l’a vu pendant la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. La France a quand même un petit pas de travers sur le regard du monde, sur la vision des choses. Est-ce que tu l’as ressenti ? Et est-ce que la littérature porte aussi cette particularité française, cette liberté française ?
Oui, je pense que c’est important. Et pour avoir vécu tellement d’années à l’étranger, j’ai envie de te dire, on a des visions du monde qui sont très différentes selon notre culture d’origine, selon la langue dans laquelle on pense les choses. Et c’est vrai que chez nous, on a quand même toujours ce côté un peu rebelle, ce côté, voilà, alors on peut appeler ça aussi grognon et désagréable pour d’autres. Ça peut arriver. Mais ça va avec aussi une certaine liberté de penser que beaucoup de gens nous envient.
Aujourd’hui, tu es établie à Kuala Lumpur pour aider un peu nos auditeurs à imaginer ton quotidien. C’est comment ? Une grande ville ? On vit à quel rythme ? On vit comment ?
Alors Kuala Lumpur, oui, c’est la capitale de la Malaisie, un petit pays d’Asie du Sud-Est dont on ne parle pas si souvent que ça, comparé à d’autres de la région. C’est une ville très agréable à Kuala Lumpur, une ville facile, pour plein de raisons. Alors d’abord c’est une ville qui fait un peu moins de 5 millions d’habitants, donc pour de l’Asie du Sud-Est c’est peu, comparé à des grandes mégalopoles comme Ho Chi Minh, comme Jakarta ou comme aux Philippines, Mani par exemple. Donc on y respire encore bien, il y a encore beaucoup de jungle. Il y a une diversité culturelle qui est énorme, tout le monde parle très bien l’anglais.
C’est un pays développé le Malaisie bien sûr, donc c’est vrai qu’au quotidien c’est ce qu’on appelle une expat facile pour ceux qui ont l’habitude. C’est un pays aussi musulman, donc c’est un monde à part. Et voilà, il est très facile de s’y intégrer, très facile d’y développer des projets. Alors tu parles d’une expatriation facile, est-ce que dans la dizaine d’expatriations que tu as vécues, tu en as connu des difficiles ? Et comment tu as su résister à une expatriation difficile ?
Alors c’est une question difficile mais je pense que quand t’es née comme ça comme moi et comme tous les gens comme moi qui sont nés dans l’expat, tu te poses plus trop la question parce que tu sais faire instinctivement au. Bout d’un certain temps. Tu t’adaptes et c’est comme ça et c’est ton monde. Maintenant c’est vrai que quand j’étais au Mexique par exemple, il y avait quand même des questions, ou en Afrique du Sud d’ailleurs, il y avait des questions de sécurité qui se posaient qu’aujourd’hui je n’ai plus. Donc quand je peux partir en claquant la porte derrière moi, c’est une facilité.
très agréable. Quand on est dans des pays sous-développés comme par exemple le Yémen ou des pays comme ça, ça a été très compliqué même de trouver un fruit, trouver des choses comme ça à l’époque où on y était, c’était compliqué. Donc là, c’est pas le problème non plus du tout à Kuala Lumpur, puisqu’on trouve absolument tout ce qu’on veut. Il y a des pays où la liberté de penser, la liberté de s’exprimer est quand même très complexe, même pas me faire d’ennemis, mais c’est vrai qu’au Vietnam, il faut faire très attention à ce qu’on fait. Quand j’avais lancé le premier salon, il a fallu que je fasse Enfin, je fasse face à la censure et d’abord à des validations avant de pouvoir faire ce que je voulais.
Tout ça, ce sont des choses qui ne sont pas une évidence pour nous finalement. Alors qu’à Kuala Lumpur, par exemple, ça n’existe pas. C’est pour ça que je parle d’exploitation facile. Et puis ma dernière question plus personnelle, tu réponds si tu as envie, tu as parlé de tes enfants, des jumeaux, qui sont un peu comme toi, nés dans l’expatriation, des enfants de la troisième culture, comme maman du coup. Aujourd’hui, élever des enfants à l’étranger, comment c’est ?
Comment notamment tu les laisses connecter avec la France ? Alors écoute, tu me donnes une perche sublimissime pour parler de l’AEFE et du travail extraordinaire qui est fait par l’AEFE, mon sponsor donc ce soir. Les lycées des français de l’étranger, c’est quand même une opportunité merveilleuse pour tous les français et les francophones qui vivent en expatriation. Moi, je suis un pur produit AEFE puisque j’ai fait toute ma scolarité dans les lycées français. Pareil pour mes enfants, ils ont 13 ans maintenant et ils n’ont fait que des lycées français.
Et c’est vrai que c’est agréable pour plusieurs choses. D’abord, c’est des formations quand même globalement de qualité qui permettent après de faire des écoles en général intéressantes. Ensuite, c’est une formation où vous êtes en collaboration avec plein de profils internationaux, différents, locaux, etc. Donc en termes d’ouverture d’esprit, c’est formidable. c’est aussi un système qui est le même partout, donc c’est quelque part une espèce de phare auquel s’accrocher pour les enfants quand tout change autour d’eux tout le temps, un espèce de point de repère qui est toujours le même et qui est très rassurant pour des enfants qui grandissent comme ça dans le changement permanent et on y fait des…
enfin moi en tout cas ça a été mon cas, mes meilleurs amis je les ai fait dans ce contexte, je me suis même mariée avec quelqu’un que j’ai rencontré dans ce contexte donc voilà merci l’EFE de A à Z. Ils ont. Financé ton mariage ? J’aurais dû leur demander, tu as raison ! En tout cas Pomme, félicitations, tu vas monter sur scène tout à l’heure, tu vas avoir les yeux qui vont se braquer sur toi, il va y avoir des articles, tu vas passer à la radio, cet éclairage ça te fait plaisir ?
Ecoute oui mais bien au-delà de l’égout parce que moi ça m’intéresse pas beaucoup ces choses là, c’est de mettre en lumière tous les projets que j’ai créés, qui me fait vraiment plaisir et je conclurai sur ça si tu le veux bien Gauthier, moi qui suis femme d’expat où on me dit souvent alors le rosé dans la piscine, les tongs, la manicure, ça se passe bien, il y a un moment ça fait rire ! Voilà, ça fit rire il y a très longtemps, c’est fini aujourd’hui depuis bien longtemps et le fait qu’une femme d’expat puisse recevoir des trophées comme ça j’ai envie de dire que symboliquement c’est très important aussi pour toutes les femmes à l’expatriation qui sont créatives, dynamiques, qui mettent en place et créent une valeur extraordinaire à l’étranger, représentent bien la France et pour ça ça me fait plaisir et je suis vraiment très reconnaissante. Félicitations, bon séjour dans la capitale française, à bientôt !
Vous écoutez la voix des expats.
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