François Bibonne est un documentariste et producteur d’événements qui a des racines vietnamiennes par sa grand-mère. Originaire de Paris, il a été immergé dès son plus jeune âge dans la culture vietnamienne, notamment à travers la cuisine et les histoires familiales. Après des études en histoire et une tentative de carrière en tant que pianiste, il a ressenti un appel irrésistible à explorer ses racines vietnamiennes après le décès de sa grand-mère. Ce voyage l’a conduit à réaliser des documentaires et à créer des événements culturels qui célèbrent et renforcent les liens entre la France et le Vietnam.
Francaisdanslemonde.Fr, la première plateforme multimédia d’aide à la mobilité internationale. Bienvenue sur notre podcast. Je suis Gautier Seyss et aujourd’hui j’ai le plaisir de recevoir François Bibonne. On va parler France-Vietnam. Francaisdanslemonde.Fr.
Le podcast. Comment on dit bonjour en vietnamien ? Xin chào. Xin chào. Xin chào.
Alors, chào anh, parce que tu… On peut se tutoyer ? Bien sûr ! Parce que tu es plus âgé, donc chào anh. Ah bah donc le mot change selon l’âge de la personne qui est en face de toi.
Et voilà, et donc en toute logique, tu devrais dire chào em parce que je suis plus jeune. D’accord. Forcément, du coup. François Bibonne, bonjour et bienvenue sur Français dans le Monde. Merci beaucoup.
On te retrouve aujourd’hui. Alors tu es à Londres, ta copine qui est vietnamienne vit actuellement à Londres, mais tu es souvent en France ou au Vietnam. Tu voyages, dis donc. On va parler de ton parcours pour commencer. Toi, tu es originaire de Paris, mais Un quart de 100 vietnamiens via ta grand-mère qui s’est installée en France pendant la guerre d’Indochine.
Très vite, petit, à la maison, il y a le Vietnam qui est dans ton ADN. Du coup, c’est des sujets qui t’intéressent en particulier très vite. Ça commence vraiment par la cuisine. Ma grand-mère cuisine une fois sur deux vietnamien. C’est des nêmes, des rouleaux de printemps, des soupes, etc.
Ça commence par les saveurs et ensuite par quelques mots. Par-ci, par-là, je lui demande comment on dit merci, comment on dit bonjour. Comme je viens de faire avec toi. Exactement. Ça commence par des petites choses comme ça.
Il y a des objets aussi. Et il y a une très vieille carte de l’Indochine. Il y a un bang, c’est-à-dire les bangs avec lesquels on fumait là-bas. Donc, il y a des petits objets, il y a des livres parce que ma grand-mère continue, elle achète des livres en lien avec le Vietnam pour continuer à en savoir plus. Et puis, il y a toute cette imaginaire, effectivement, que je me construis tout seul parce qu’en fait, je ne connais pas mes autres grands-parents.
C’est-à-dire mon grand-père est décédé du côté… Le mari de ma grand-mère est décédé quand j’avais 3-4 ans, et puis mes autres grands-parents, je les ai pas connus. Donc il se trouve qu’en fait, ma grand-mère, on va dire, canalise un petit peu toutes mes origines dans ma tête. Alors tu fais tes études, tu passes ton bac, ensuite tu as un master d’histoire, tu te dis que tu vas devenir pianiste, tu fais beaucoup de piano jusqu’à 6 heures par jour, jusqu’à te rendre compte que c’est un peu trop statique pour toi, évidemment, se promener avec un piano, c’est pas facile. finalement tu vas arrêter ça et puis il va se passer un événement important le décès de ta grand-mère et vous allez décider d’aller pour la première fois pour toi de ta vie au Vietnam et là tu m’as dit j’ai eu une sensation inexplicable dis-moi un peu ce qui s’est passé dans ton corps lorsque.
Tu t’es retrouvé au Vietnam C’est le dernier jour avec mes parents et mon frère. On est au Vietnam et on doit aller à l’aéroport très vite. Je suis en plein centre de Hanoi. On doit partir, on se déplace pour aller rejoindre un taxi. Je regarde les murs qui sont jaunes.
Et il y a quelque chose qui me dit, il faut que tu restes. Vraiment, c’est quelque chose de surréaliste, une sorte d’appel en fait. Moi, je ne suis pas croyant, mais là, sur le coup, je me disais, mais qu’est-ce qui se passe ? Il faut que je reste au Vietnam. Et donc, je retourne en France et là, je fais tout pour retourner au Vietnam.
J’essaie d’avoir un projet pour essayer de me dire, je ne vais pas là-bas juste comme ça. En tant que baroudeur, je voulais avoir un projet. Donc, je repars tout seul une première fois pour faire un stage de marketing dans une agence de voyage. Alors tu retournes en effet, tu y travailles pendant trois mois, puis retour en France, tu travailles dans le domaine de la musique classique à Paris. Mais ce Vietnam reste toujours là, et puis c’est à travers la musique que toute l’affaire va commencer.
Aujourd’hui tu produis des documentaires, tu produis des événements autour de ces relations entre le Vietnam et la France. Alors on va dire un petit mot quand même, ça a été un protectorat français, il y a eu la guerre, l’indépendance en 1954, J’ai découvert en surfant sur internet évidemment, merci internet, qu’il a fallu attendre 1993 pour que la France reconnaisse l’indépendance du Vietnam. Bref, on a eu une vraie histoire commune entre les deux pays et toi l’idée c’est de recréer des ponts culturels entre nos deux pays. Oui, alors le pont effectivement il est Comment dire ? Il est d’une part…
En fait, j’ai joué sur une métaphore. Il y a le pont effectivement culturel, il y a le pont d’abord fait de Long Bien. Ça, c’est quelque chose qui est important pour mon projet, c’est que quand je retourne au Vietnam, je découvre un pont qui a été construit par les Français à la toute fin du 19e, début 20e siècle. et un pont qui aujourd’hui est vraiment reconnu par les Vietnamiens. Les Vietnamiens adorent ce pont, c’est un peu la tour Eiffel de Hanoï si vous voulez, parce que c’est un vieux pont avec le même matériau, le même esprit que la tour Eiffel.
Et donc je me dis, mais c’est ça en fait, je suis en train de faire des ponts moi aussi. Et donc je pars avec cette image du pont pour ensuite effectivement faire un pont. Donc je fais un pont à travers la musique, à travers la musique classique, je montre comment les deux pays on nouait une certaine amitié très spéciale et puis artistique aussi. Et puis là, avec ce second projet, je fais un second film sur le football et là, c’est le pont du sport. Et donc, chacun a son pont intérieur qui le relie à ses origines aussi.
Je trouve que c’est très, très beau comme mot pour montrer ça. Et en l’occurrence, le sport aujourd’hui, il y a eu l’humour, la musique, la mode à venir, le luxe. Il y a plein de passerelles. Finalement, quand on creuse un peu, on se rend compte qu’on est très proche et qu’on a beaucoup de liens historiques qui s’effacent peut-être parfois ou qui s’oublient. Oui, effectivement, il y a des liens qu’on se remémore, qu’on oublie avec le temps.
Et puis, en fait, il y a même des liens, des ponts qu’on crée. Je me suis rendu compte que non seulement j’illustre des ponts qui ont existé, Mais en fait, en toute modestie, je permets aussi de créer des ponts, c’est à dire quand on fait un film, on produit un concert, par exemple, en première partie du film. Avant de le projeter, on rassemble des gens et on crée des nouveaux liens. On fait appel à des illustrateurs pour faire une affiche du film ou à des musiciens pour faire la musique. On fait des équipes, on forme des équipes et en fait, ça devient un projet collectif et c’est un nouveau pont, effectivement.
Et ces ponts là, en fait, ils sont Ils marchent très bien parce qu’en fait, la diaspora vietnamienne, c’est une des diasporas qui est la plus active dans le monde au niveau des liens, de la solidarité qu’il y a. C’est vraiment très, très, très, très fort. C’est aussi des ponts qui se créent. Alors les colonies, elles ont plus ou moins bien réussi à travers le monde. En Afrique, on a été un peu maladroit.
Tu me disais qu’aujourd’hui, les relations entre nos deux pays sont très bonnes. Il n’y a pas d’arrière-goût amer de notre histoire. C’est effacé. Oui, en fait, les choses ont beaucoup évolué dans le sens où d’une part, la société vietnamienne va vraiment vers le futur. Elle pense moins à son passé, elle est vraiment portée vers le développement économique, c’est l’essor du tourisme, c’est la modernisation, etc.
On est vraiment, on va vers l’avant. Et ensuite, quand on parle, quand on est en tant que Français, en fait, au Vietnam, Je dirais même plus qu’on a des avantages. On n’a pas vraiment d’inconvénients à être français. Il n’y a pas de gêne ou quoi. Donc moi, de ce point de vue là, ça s’est vraiment bien passé.
Et je trouve que vraiment, le Vietnam est un pays très, très accueillant. Alors tu as travaillé sur un documentaire qui s’appelle Once Upon a Bridge in Vietnam, un documentaire que tu vas diffuser à plusieurs endroits différents. Tu dois avoir une certaine fierté lorsque la projection commence. Alors les premières projections, c’était assez intimidant parce que c’est la première fois, c’est mon premier film et non seulement c’est mon premier film mais il se trouve que je figure dans mon propre film, c’est à dire qu’il y a un aspect un peu autobiographique et donc effectivement c’est un peu intimidant et au fur et à mesure de la réception, je vois comment ça se passe, la réception de l’audience, du public qu’il y a vraiment une sorte de synergie qui se passe, quelque chose vraiment de très, très beau. Au fur et à mesure, on prend confiance et ça va de plus en plus.
Ça prend de l’ampleur. Au début, c’est dans les petites salles. On est 20, 30. Après, c’est un vrai cinéma. Après, c’est dans une salle encore plus grande avec un écran géant.
C’est vraiment assez… Ça me fascine toujours de voir que je voyage avec ce film. François, du coup, tu es une espèce de Gustave Eiffel moderne puisque tu crées à nouveau des ponts. Lorsque la projection est terminée, je suppose que des Français, des Vietnamiens se retrouvent à boire un verre et à créer de nouvelles relations. Ça doit être assez plaisant.
En fait, ce qui est amusant, c’est que chaque projection est un pont. Effectivement, à chaque projection, presque, je ne sais pas s’il y a une projection, sans cet effet-là, dans le sens où il y avait toujours une personne qui ensuite est venue me voir et m’a amené vers une autre projection, vers un autre événement. C’est vraiment, c’est des ponts, effectivement. C’est vraiment le mot du jour, c’est le pont. Résultat, tu vas te retrouver à Boston, à Havard, pour représenter le documentaire.
Waouh, c’est quand même classe. Et bien, c’est pareil, c’est assez incroyable. Grâce à une autre projection qui s’était faite à Columbia. J’étais déjà allé à New York, à l’université de Columbia, pour projeter le film. Et grâce à cet événement-là, ça m’a amené vers Harvard, plus d’un an plus tard.
Ça me fait voyager. Il y aurait finalement un film à faire sur, non pas la tournée des projections, mais sur la diaspora vietnamienne qui reçoit ce film, quels sont leurs ressentis, etc. Et ce serait un projet de film qui serait très beau, c’est d’étudier les Vietnamiens dans le monde. Et te concernant un projet de vivre définitivement au Vietnam ou le mélange entre les deux pays ça te va bien aussi ? Alors bon d’une part le mélange est très beau je pense que c’est toujours bien d’avoir un certain métissage mais effectivement je vais prendre le risque de m’installer un peu plus longtemps au Vietnam.
donc à la rentrée, et je pense qu’il y a énormément de choses à faire, il y a beaucoup de gens qui sont volontaires, et je pense qu’en tant que porteur de projet culturel, ça ne peut que marcher au Vietnam. Est-ce que je peux te demander pourquoi tu m’as dit « prendre le risque » ? Prendre le risque, parce qu’effectivement, Déjà, je reste français, donc j’ai toujours cette mentalité, ce frein qui est peut-être assez propre à la culture française. Souvent, on a envie de réfléchir longtemps, de planifier avant d’agir. Moi, j’ai une démarche assez inverse, c’est-à-dire que j’agis et après, je réfléchis souvent.
Donc, c’est comme ça que je dis que c’est un risque. Après, effectivement, j’ai eu tellement d’expérience et de passé au Vietnam que c’est quand même mille fois moins risqué que la plupart des gens qui iraient pour la première fois. Je te souhaite le meilleur en tout cas, de jolies projections, de belles rencontres, des beaux moments de vie qui vont se créer grâce à ce rendez-vous Once Upon a Bridge in Vietnam. L’autre projet, on en reparlera ensemble plus tard, tu es en train de travailler dessus. Et si vous êtes intéressé, si vous voulez l’aider dans son travail de documentariste et de production, vous pouvez le contacter de notre part.
François, merci beaucoup. J’espère que tu vas vivre de bons, grands moments intenses dans les prochaines semaines. Merci beaucoup, enchanté encore et à très vite, j’espère.
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