.
Avez-vous déjà ressenti un choc culturel en arrivant dans un nouveau pays? Dans cet épisode de « Voici 10 minutes, le podcast des Français dans le Monde », Gauthier Seys discute avec Gwenael Thing Leoh, une psychologue nomade, pour explorer les défis et les impacts du choc culturel sur les expatriés et les voyageurs. Ensemble, ils abordent les différentes manières dont le voyage peut transformer une personne, que ce soit en tant qu’expatrié ou simple voyageur.
Gwenael Thing Leoh est une psychologue avec un parcours de vie exceptionnellement riche en voyages. Née à La Réunion, elle a étudié en France avant de parcourir le monde, vivant dans des pays comme le Japon, Taïwan, la Thaïlande, le Cambodge, la Malaisie, le Mexique, les États-Unis, et l’Honduras. Actuellement installée au Guatemala, elle utilise son expérience personnelle et professionnelle pour aider d’autres expatriés à naviguer les complexités psychologiques de la mobilité internationale.
L’épisode se concentre sur le choc culturel, ses symptômes et ses conséquences. Gwenaëlle explique que le choc culturel peut provoquer du stress, de l’anxiété, un sentiment de solitude et même de la désorientation. Elle partage des stratégies pour mieux gérer ces sentiments, comme se renseigner sur le pays d’accueil, rejoindre des groupes d’expatriés, et créer une « boîte à souvenirs » pour garder un lien avec ses racines. Elle souligne l’importance de ne pas hésiter à chercher de l’aide professionnelle si nécessaire, pour mieux vivre cette transition et profiter pleinement de l’expérience d’expatriation.
.
.
Chapitrage de l’épisode
Voici 10 minutes, le podcast des Français dans le Monde. Pour aider tous ceux qui se préparent, qui vivent ou qui rentrent de mobilité internationale, rendez-vous sur francaisdanslemonde.fr. Je suis Gautier Saïs et j’ai le plaisir de passer 10 minutes avec Gwenaëlle Tingléo. On va parler du choc culturel. Bonjour Gwenaëlle.
Bonjour ! Content de te retrouver, nous avons eu l’occasion dans le podcast 1869 de faire connaissance, toi et moi, et les auditeurs de la radio des Français dans le monde, un parcours, on peut dire assez complet, de nomadisme sur la planète. Tu nais sur l’île de la Réunion, tu viens étudier en France à Lyon. Ensuite, tu vas connaître des voyages au Japon, Taïwan, Thaïlande, Cambodge, un confinement incroyable en Malaisie. puis le Mexique, les USA, l’Honduras, et tu vis aujourd’hui au Guatemala, mais tu viens également de temps en temps en France, en l’occurrence tu es à Montpellier, au moment où on se parle, je viens de faire le tour de la MapMonde avec toi.
C’est exactement ça, j’ai commencé du coup en étant backpacker, voilà, pendant deux ans et demi. Et des études de psychologue, te voilà psychologue nomade. C’est vrai que l’avantage de ce métier, c’est que n’importe quel habitant de la planète peut pouvoir avoir besoin des soins d’un psy. Exactement. Et surtout, là, ce que je me suis rendu compte justement en backpackant, c’est que c’est impressionnant comment le voyage, ça peut impacter quelqu’un, que ce soit d’ailleurs en tant que juste voyageur en face d’un pays à l’autre ou en tant qu’expat.
Et du coup, je me suis dit que ça pourrait être intéressant justement d’aider les personnes là-dessus. Et du coup, c’est pour ça que je me spécialise pour l’expatriation, le backpackisme. Etc. Et quand on arrive sur ton site, on a la phrase « et si le voyage était un nouveau point de départ, est-ce que le voyage peut être une fuite psychologique pour quitter quelque chose qu’on ne supporte plus ? » Bien sûr, pour le coup.
Effectivement, ça peut être une fuite, mais ce n’est pas forcément une mauvaise chose au départ, à partir du moment où, justement, je trouve que ça peut apporter beaucoup. Il y a des personnes qui vont être coincées, par exemple en France, dans le travail, etc., qui vont sentir qu’elles ont besoin de partir, et en partant, vont se rendre compte d’à quel point elles étaient, par exemple, bloquées sur certaines choses, ou vont justement comprendre qu’il y a certainement d’autres choses sur lesquelles elles peuvent relativiser. Elles vont avoir une ouverture d’esprit. Et c’est sur ce surpoint-là que je dis que ça peut être un nouveau. Point de départ, justement.
Alors, dans tous les cas, quitter son train-train, sa routine, son cadre de vie, ça peut être l’occasion de découvrir qu’on vit autrement ailleurs, d’où le choc culturel parfois, parce qu’on peut être très décontenancé par ça. Dans tous les cas, quand on a connu qu’un seul schéma, c’est difficile de se projeter ? Totalement, moi je sais que justement quand j’habitais à La Réunion, je pense que j’avais une version assez édulcorée de la vie, comme on a vraiment un métissage culturel là-bas, tout le monde, il n’y a pas forcément de racisme, ce genre de choses. Alors qu’en arrivant en France, j’ai pu avoir certaines réflexions qui étaient très choquantes au début. Mais donc, au final, je suis contente d’avoir fait l’expérience parce que ça m’a permis d’ouvrir les yeux sur le « bah oui, pas toutes les cultures sont pareilles, pas toutes les personnes ont la même manière de voir les choses » et c’est aussi important de savoir ça en fait.
Alors en effet, toi, ton premier choc culturel, c’est de quitter la France pour t’installer en France. Tu quittes la Réunion, qui est quand même dans un autre mindset que la vieille France. Quand tu arrives à Lyon, par exemple, en effet, je me souviens qu’on avait évoqué le sujet du racisme que tu prends en pleine tête. D’un coup, tu vois des gens qui veulent gagner de l’argent, qui… Je sais pas, c’est tout à fait différent.
Là, toi, tu vis ton premier choc à toi. Oui, c’est tout à fait ça. Et justement, en voyant tout ça, c’est là où vraiment je me suis dit, wow, où est-ce que je me retrouve ? Qu’est-ce que je fais ? Je me suis sentie très seule aussi, dans un certain sens.
Ce qui est vraiment ça, quand on a le chat culturel, c’est un petit peu le sentiment de, en fait, je suis différent des personnes qui sont autour de moi. Qu’est-ce que je fais là, un petit peu ? C’est aussi un petit peu déprimant, dans un certain sens, parce qu’il y avait aussi l’image que j’avais de la métropole et celle que j’ai eue dans la réalité. Et ce décalage-là peut être du coup très difficile, finalement, à encaisser. Ça peut causer aussi parfois un peu du stress.
Du coup, comment me comporter avec telle ou telle personne pour ne pas frasser, pour ne pas me faire dire de partir ou ce genre de choses ? Concrètement, les symptômes sont vastes et peuvent varier d’une personne à l’autre. Oui, il y a quand même des symptômes qu’on retrouve, notamment justement le stress, tout ce qui est stress, anxiété, un peu un sentiment de solitude qui arrive justement parce qu’on est confronté à quelque chose dont on n’a pas l’habitude, un sentiment aussi ce qu’on appelle de désorientation. On ne sait plus du coup c’est quoi les bases un peu, les normes sur lesquelles se baser. Il peut aussi y avoir pour certaines personnes de l’insomnie.
En fait, ça prend tellement de la place, il y a tellement d’idées qui nous viennent, on ne sait tellement plus où on se trouve que du coup, ça reste dans notre esprit, on rumine énormément. Ça peut créer de l’infirmier, des pensées un petit peu négatives, et on peut commencer aussi à voir tout ce qui nous entoure de manière négative finalement. Et s’isoler ? Et s’isoler, totalement. S’isoler d’ailleurs de plus en plus, et parfois j’ai pu avoir des personnes en accompagnement qui n’osaient plus même sortir, en fait, de l’autre partie.
On a sans doute des auditeurs qui sont en train d’écouter quelque part dans le monde et qui se rappellent d’avoir vécu ce choc culturel. On parle d’une courbe du choc de l’expatriation dans laquelle justement la découverte de l’autre peut être un moment un peu assourdissant. Ce n’est pas obligatoire mais ça arrive très très souvent. Effectivement, ça arrive très souvent dans ce côté pour s’adapter à un pays finalement. C’est ce côté où quand on arrive, on est tout excité, c’est génial.
Et après, c’est là où on se prend le choc et on se rend compte qu’en fait, il n’y a pas exactement tout qui est beau, tout qui est mignon. Et c’est justement ce moment-là où on commence à marchander un peu, à se dire, OK, là, c’est compliqué, mais peut-être que je peux essayer de faire ça ou ça pour m’adapter ou peut-être qu’il y a quelque chose d’autre à voir. que là on commence toute une phase qu’on appelle d’introspection finalement, sur nous, sur nos comportements ou sur le comportement des autres, qui peuvent nous aider à nous adapter après dans le pays où on se trouve. Je suppose que certains font ce travail d’introspection seuls et que ça fonctionne, d’autres ont besoin d’un coup de main. Effectivement, c’est totalement quelque chose qu’on peut faire seul.
D’ailleurs, je pense que même avec les personnes que j’accompagne moi personnellement, il y a aussi des petits exercices que je leur donne. Déjà, il y a tout un côté de… Justement, on parlait tout à l’heure de ce sentiment de solitude qu’on peut avoir, d’isolement. C’est important de pouvoir en parler à d’autres personnes. Je sais qu’en voyage, beaucoup de personnes vont se dire, voilà, je voyage, j’ai de la chance.
Donc je n’ai pas le droit de me sentir pas bien. Là, par exemple, je suis sur une plage, c’est magnifique, mais je me sens pas bien, c’est pas normal. Et du coup, ils vont avoir honte de parler à d’autres personnes. Alors qu’au contraire, tout voyageur, et je peux quasiment mettre ma main au feu à expérimenter ce sentiment-là, ce chapitre à la, au moins une fois. Et c’est important de pouvoir partager, de pouvoir en parler à d’autres personnes.
d’autres personnes qui vont me comprendre. Pas forcément la famille ou les amis dans ce cas-là, mais peut-être d’autres expats, d’autres voyageurs. Je vois très souvent, on n’en parle plus forcément maintenant, mais Facebook. Il y a plein de groupes Facebook avec des groupes de type Les Français à… Par exemple, il y a Les Français à San Francisco, Les Français au Canada, etc.
où les gens, justement, peuvent échanger là-dessus et ce sont des personnes qui comprennent ce parcours en dépassé. Gwenaëlle, est-ce que finalement, appeler un ami ou la famille qui est restée en France métropolitaine, c’est pas le pire des choix pour s’entendre dire « oh ça va, t’es au soleil, plains-toi pas » et s’isoler encore plus ? Est-ce qu’on peut pas avoir un risque, en se tournant vers la mauvaise personne, de se prendre une claque supplémentaire ? Effectivement, c’est là où ça peut être compliqué. Après, bien sûr, ça dépend.
Certaines personnes vont pouvoir être ouvertes et pas avoir ce côté-là, mais c’est vrai que si on appelle quelqu’un de la famille et qu’on se prend ça dans la tête, ça prend du coup une envergure encore plus énorme et c’est encore plus dur, et du coup, ça donne pas envie de parler. C’est aussi dans ces moments-là où potentiellement, dans ce cas-là, un professionnel, ça peut être intéressant parce que là, c’est quelqu’un aussi qui est plus neutre, qui saura pourquoi aussi, surtout quand, dans mon cas, c’est quelque chose que j’ai déjà expérimenté, tout simplement. Et donc, il ne faut pas avoir honte de se connecter avec un psy en ligne comme tu fais toi. En plus, le fait d’être un peu dans la distance, on peut travailler sur le terrain psychologique, même à distance, même à vision. Bien sûr.
Au final, on se voit quand même, et c’est important. Et c’est surtout la parole, pouvoir échanger, etc. Moi, je sais que j’ai toujours le mouvement où je mets les gens à l’aise, ça, c’est sûr. Et aussi, ce qui est important, c’est qu’on part quand même sur un partage d’histoires, sur le principe où ils savent que moi, j’ai aussi été dans le voyage, etc. Donc je suis passée par certaines choses.
Ce n’est pas juste, je vais leur dire, essayez cet exercice-là alors qu’il n’y a pas de frais, c’est des choses que j’ai moi-même vécues, expérimentées et qui, du coup, m’ont aidée au final. Est-ce que parfois, on doit passer par la case médicaments ? Ça dépend des personnes dans le groupe. Parce que oui, il y a des personnes, par exemple, qui vont avoir des énormes crises d’angoisse, qui font des attaques de panique, etc. Quand ce qu’on appelle la crise est beaucoup trop énorme, c’est vrai que juste voir un psychologue, ça va être un peu compliqué, en fait.
Il faut parfois passer par des médicaments, etc. pour diminuer juste la crise, pour pouvoir ensuite pouvoir en parler, avoir plus la conscience de, OK, c’est bon, j’ai quelque chose pour me rassurer et on peut passer à autre chose. Est-ce que tu peux conseiller aux auditeurs qui vont s’apprêter à vivre la mobilité internationale de faire des choses avant ? Parce que souvent, dans la médecine, prévenir, c’est guérir. Totalement.
Déjà, la première chose que je recommanderais, si ça paraît trop bête, mais de se renseigner sur le pays, au niveau justement des cultures, de la nature, de comment sont les personnes, etc. Parce que maintenant, on a beaucoup d’informations sur Internet. Et plus on en sait, plus on pourra se préparer un petit peu en avance sur le OK, ça, c’est différent. au moins maintenant je le sais, si je le vois, je serais bien choquée. Il y a aussi ce côté-là de, je parlais des groupes Facebook, les Français A, n’hésitez pas à demander avant, qu’est-ce qui vous a choqué, comment est-ce que vous êtes sortis ?
Il y a vraiment un groupe. Les gens du voyage, je trouve, sont très ouverts et très aidants. Il y a un autre truc que je recommande aussi, c’est de faire ce qu’on appelle une boîte à souvenirs. C’est un peu ce côté-là où vous allez prendre une boîte et à l’intérieur, vous allez mettre des petits mementos. Ça peut être des photos de notre famille, de nos amis, de nos proches, etc.
Ça peut être un objet qui nous fait rappeler notre maison, tout ça. Tout plein de petites choses qui nous rappellent des moments heureux et sympas dans ce qu’on considère notre chez-nous. Donc, quand on est là-bas et qu’on a un petit moment un peu de down, c’est un peu plus dur, on peut voir tout ça, se remémorer tout ça et se rendre compte que, OK, là, on a peut-être ce sentiment de solitude, mais en réalité, on n’est pas tout seul. Il y a des gens qui nous connaissent. On a une culture spécifique qui est peut-être différente de celle dans laquelle on est, mais qui existe encore.
On me conseille souvent, quand on parle d’interculturel, d’être un peu attentif, observateur en première phase, lorsqu’on découvre une nouvelle culture, une nouvelle façon de fonctionner, un autre mindset. Pas forcément faire le français et de donner son avis sur la chose, mais d’observer un peu. Ça peut faire du bien de juste regarder comment les autres font. Totalement, et je trouve que pour moi c’est aussi l’un des côtés super intéressants du voyage, c’est de prendre ce temps, déjà de manière générale, prendre son temps en fait, de se poser, d’observer autour de nous, de participer aussi aux événements culturels de l’autre pays, parce qu’il y a toujours beaucoup de choses à apprendre. Je sais que là où j’habite au Guatemala, j’habite dans un village maya en fait, et c’est vraiment génial parce que très souvent, ils ont justement des événements culturels, et j’adore juste aller là-bas, voir ce qui se passe, pas forcément participer.
mais juste de voir comment ils font, comment ils fonctionnent, comment ils échangent, etc. On découvre une nouvelle culture lors d’un premier voyage, on s’en sort, ça va mieux, on s’y habitue, on fait un autre voyage, on peut revivre un autre choc où c’est un pour la vie, comme la coqueluche.
Alors, pour le coup, on peut revivre un choc. Après, ce qui est important aussi à savoir, c’est que le choc culturel, ce n’est pas obligatoirement très violent. Ça dépend vraiment des personnes et des moments. Du coup, on peut avoir un choc culturel, mais un peu moins violent. Ça peut être un peu plus insidieux pour le coup.
Ça peut être un moment où on va se dire, oh là là, moi, par exemple, en arrivant en Guatemala, j’étais surprise de me dire que j’avais un choc culturel parce que ça fait longtemps que je voyage réellement. Mais au début, c’était génial. Et après, j’ai des voisins, ils mettent la musique, il y a une église qui met la musique à fond, qui ne chante pas forcément très bien. Tous les soirs, après, il n’y avait pas forcément des produits que j’ai cherchés, ils n’étaient pas forcément là. Et c’est plein de petites choses qui, en fait, m’énervaient petit à petit.
Et à un moment, je me sentis un petit peu déprimée. Et c’est là où je me suis dit, En fait, j’ai encore un petit choc culturel et ça m’est arrivé, j’ai refait ça, du coup j’ai plus investi la maison où j’étais, j’ai plus rencontré des personnes et c’est comme ça aussi que j’ai pu dépasser ça finalement. Donc oui, c’est tout à fait possible de refaire des petits chocs culturels à chaque fois. Avec 110 000 auditeurs à travers la planète. Si quelqu’un écoute cette interview et sent qu’elle est peut-être bien assise dans le creux de la vague, elle peut contacter Gwenaëlle de notre part.
Le lien pour te contacter est dans ce podcast. Merci Gwenaëlle, c’est clair. Évidemment, le sujet en 10 minutes, c’est difficile. À la radio, je voulais juste qu’on allume un peu ce petit voyant parce que ça peut quand même avoir des conséquences très négatives pour la santé, pour le moral, pour son expérience d’expat. Totalement, je suis d’accord.
C’est important de savoir qu’en fait, ce n’est pas anormal d’avoir ces sentiments-là quand on est en expatriation ou en voyage. C’est OK et c’est tout à fait normal aussi de demander de l’aide quand on en a besoin. Merci beaucoup pour cet éclairage. Je te souhaite une belle journée à Montpellier et un bon retour prochainement au Guatemala en écoutant le soir ces gens chanter faux dans cette église près de chez toi. Merci beaucoup Gautier.