Yara Paradis-Bsaibes : surmonter les défis psychologiques de l’expatriation

Avez-vous déjà imaginé les défis psychologiques auxquels sont confrontées les personnes qui quittent leur pays d’origine pour s’installer à l’étranger ?

Dans cet épisode de « 10 minutes, le podcast des français dans le monde », réalisé en partenariat avec le réseaux d’experts « Expat Pro », Gauthier Seys explore cette question cruciale avec son invitée, Yara Paradis-Bsaibes, une psychologue clinicienne et psychothérapeute. Ensemble, ils discutent des complexités émotionnelles et mentales que rencontrent les expatriés, de l’adaptation à une nouvelle culture à la gestion des sentiments de déconnexion avec leur pays d’origine.

Yara Paradis-Bsaibes, née au Liban, est une professionnelle accomplie qui a commencé sa carrière dans le milieu carcéral libanais avant de s’installer en France pour élargir ses horizons académiques et professionnels. Malgré les défis administratifs, elle a réussi à obtenir les équivalences nécessaires pour exercer en France et est récemment devenue citoyenne française. Son parcours personnel et professionnel riche en expériences multiculturelles lui permet d’apporter une perspective unique sur les enjeux de l’expatriation.

Dans cet épisode, Yara partage son expertise sur les enjeux psychologiques liés à l’expatriation, tels que l’intégration culturelle, l’impact des procédures administratives sur la santé mentale et la gestion des identités multiculturelles. Elle souligne l’importance de la persévérance et de la clarté des désirs personnels dans le processus d’adaptation à un nouveau pays. En tant que psychologue, elle offre des consultations en ligne pour aider les expatriés à naviguer dans ces défis, tout en mettant en lumière la nécessité d’une sensibilisation accrue aux problèmes de discrimination et de racisme dans les sociétés d’accueil.

https://yaraparadis.fr/


Podcast n°2558 (juillet 2025)

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Chapitrage de l’épisode :
0:00:01 – Introduction du podcast
0:00:49 – Présentation de Yara Paradis-Bsaibes
0:01:61 – Retour sur le parcours de Yara au Liban
0:02:147 – Expérience de travail en milieu carcéral
0:02:186 – Déménagement en France et équivalence de diplôme
0:04:250 – Défis administratifs et démarches pour exercer en France
0:05:309 – Obtention de la nationalité française
0:06:369 – Consultations en ligne pour expatriés
0:07:474 – Défis psychologiques de l’immigration
0:09:577 – Thématique du racisme et discrimination
0:11:682 – Importance de l’acceptation des différences
0:12:746 – Explosion de Beyrouth et impact sur les Libanais


Transcription IA du podcast :

Bienvenue dans 10 minutes, le podcast des français dans le monde, pour aider tous ceux qui se préparent, qui vivent ou qui rentrent de mobilité internationale. Je suis Gauthier Saïs et j’ai le plaisir de passer 10 minutes avec Yara Paradis Saïbes, on parle psychologie. 10 minutes. Mon invité a un nom de star, star de la chanson, Yara Paradis, magnifique. Bonjour, bienvenue Yara.
Bonjour Dossier. En tout cas, si tu veux quitter ton métier de psy, tu peux faire artiste. C’est un nom déjà prédestiné. Oui, on se retrouve aujourd’hui dans le cadre du partenariat avec Expat Pro. Nous allons parler de ton métier de psychologue clinicienne et psychothérapeute.
Mais avant, si tu le veux bien, on revient sur ton parcours. Alors toi, tu es né au Liban. Pas très loin de Beyrouth, près du mont Liban. La famille est là-bas aujourd’hui. Tu y retournes de temps en temps ?
Oui, en fait, on essaie de partir une fois, deux fois par an. Ça dépend du contexte aussi de sécurité. Parce que là, actuellement, il y a beaucoup de conflits au niveau de la politique du pays. Donc voilà, ça dépend. Si on peut y aller, on y va une fois, deux fois par an.
Et c’est pas facile de suivre l’actualité de ce pays qui est en plein tangage. Tu as un lien particulier avec cette actualité ou via la famille ? Oui, bien sûr. Mais bien sûr, j’ai des informations. J’essaye de lire les actualités, mais j’essaie aussi de me protéger parce que ce n’est pas évident de vivre dans un pays comme la France et être toujours connecté à notre pays d’origine.
Voilà comment pouvoir fonctionner, comment pouvoir se concentrer sur le quotidien. Et en parallèle, il y a notre pays d’origine qui est en guerre. Ce n’est pas évident. psychologique. Tu vas faire tes études là-bas, un master au Liban.
Tu vas commencer à travailler notamment dans le milieu carcéral. T’as dû en voir des vertes et des pas mûres, comme on dit en France. Oui, j’ai eu l’occasion de travailler dans le milieu carcéral au Liban. C’était une expérience très riche. J’ai pu fréquenter des personnes incarcérées, de prendre une idée comment on traite ces personnes.
dans une grande précarité sociale et c’est une expérience qui m’a beaucoup marquée. Ça m’a enrichie au niveau professionnel et même personnel. Alors, le Liban est un pays francophile. Tu parlais déjà la langue française, tu as étudié en français. Ce n’est pas très loin la France du Liban.
C’est quand même bien parce que tu aurais pu choisir une destination plus lointaine et tu voulais ne pas t’éloigner de trop. Ton frère est également à Paris. C’est assez naturellement qu’à 27 ans, tu vas décider de venir reprendre des études en passant par la case équivalence. Parce que quand on est psychologue, on ne peut pas exercer directement en France. Il faut passer par cette étape là, qui n’est pas une chose simple ?
Exactement, pas du tout simple. En fait, j’ai fait mon master professionnel au Liban et j’ai décidé de partir pour voir d’autres horizons, pour découvrir une autre manière de penser, de vivre et d’élargir mes perspectives. Donc je suis arrivée, je me suis inscrite pour faire un master de recherche en psychanalyse et interdisciplinarité à Paris, mais par contre je ne pouvais pas pratiquer. en tant que psychologue parce que mon master professionnel n’est pas… Il faut faire l’équivalence entre les deux pays.
Donc certes, il y a eu des défis à ce niveau, au niveau des procédures administratives en France, qui me rendent beaucoup de courage. C’est important de se renseigner de nos droits pour pouvoir avancer dans cette démarche. Alors en l’occurrence, tu as obtenu à l’époque un numéro Adélie te permettant d’exercer. Aujourd’hui, ça s’appelle le RPSS. En gros, l’info qu’on peut passer, c’est ceux qui vont suivre ton chemin.
Préparez-vous en amont, quoi. Oui, exactement. Préparez-vous en amont parce qu’il y a beaucoup de documents à préparer. Certes, en fait aussi, il faut traduire le mémoire. Si le mémoire a été fait dans une autre langue que la langue française, il faut faire l’équivalence.
Et malheureusement, il y a des personnes, des collègues que j’ai rencontrés qui ont beaucoup eu des difficultés au niveau des équivalences. Donc il faut bien se renseigner, connaître ses droits, certes ses devoirs aussi, mais se rapprocher peut-être des syndicats qui peuvent aider pour faire ces procédures. Alors, tant qu’on est dans les procédures, il y en a une autre qui t’a pris un petit parcours du combattant également, c’est de devenir française, d’avoir la double nationalité. Tu rencontres ton mari qui est français. En gros, en France, pour devenir français, il y a deux chemins possibles, soit via les études.
Par décret, tu peux obtenir la nationalité ou au bout de quatre ans de mariage. Dans les deux cas, toi, tu as pris le chemin, donc te voilà française. Et d’ailleurs, dans quelques heures, tu vas assister à une cérémonie en préfecture et tu vas obtenir ton livret de nationalité. Je pense que ça va faire un petit frisson. Oui, en fait, d’ailleurs, hier, j’ai reçu l’invitation à la cérémonie d’accueil pour la cérémonie et j’étais très émue.
Et aujourd’hui, en réfléchissant qu’on va faire ce podcast, je me disais mais c’est C’est une très belle coïncidence. J’étais très émue. C’était un parcours difficile, riche. Et du coup, je pense que ce sera le début, mais pas la fin de ce parcours difficile. Parce que là, j’ai deux nationalités.
Il faut intégrer tout ce qui est nouveau dans mon identité et faire ce mélange. pour pouvoir aussi avoir une identité et pour deux cultures en fait. Cela dit, Yara, je connais une bonne psy qui pourrait t’accompagner puisque c’est un peu ta spécialité si j’ai bien compris aujourd’hui. Depuis quelques mois, tu proposes des consultations en ligne à destination des expats, en l’occurrence principalement des patients qui ont un peu comme toi, donc du coup ce parcours migratoire et qui se retrouvent dans un pays différent, culture différente, avec des problèmes parfois d’adaptabilité ou des difficultés d’intégration. On a du mal à se rendre compte.
Moi, je suis un Français né en France. Je ne me rends pas compte. Tu es à la chance. Oui, je sais bien que j’ai cette chance. D’ailleurs, les gens devraient bien se rendre compte qu’ils ont de la chance.
Ce n’est pas simple de vivre une immigration. Exactement. En fait, il y a beaucoup des enjeux et des défis psychologiques. Déjà, on arrive dans un pays où on ne connaît rien, on ne connaît pas le système, on ne connaît pas les lois. Il faut s’intégrer, il faut s’adapter, il faut comprendre les codes culturels qui nous dépassent.
Même si on comprend la langue, surtout dans la langue française, il a une grande subtilité. Donc même entre les Français, parfois c’est compliqué de se comprendre. Du coup, avec quelqu’un qui vient avec d’autres bagages psychologiques, c’est très difficile. Et je vois ça dans ma clinique, en accompagnement des familles qui ont un parcours migratoire, combien ils souffrent et galèrent au niveau administratif et au niveau de l’accès aux soins. ils n’ont pas les codes, ils n’ont pas les manières de faire.
Moi, j’essaie de jouer ce rôle de tiers, mais du coup, ce n’est pas évident de rapprocher les points de vue pour les aider aussi parce que ça touche leur santé mentale à part les difficultés administratives. Tout ça, ça impacte leur santé mentale. Et au-delà d’un système administratif qui peut être parfois un peu rigide et long, il y a aussi l’intégration tout court, le regard des autres, son pays qu’on laisse derrière soi. Ce n’est pas simple mentalement, justement. Mentalement, ce n’est pas simple, mais après, quand on choisit un autre pays, il faut renoncer à beaucoup de choses à côté.
Et ça, ça coûte cher au niveau psychologique, mais ça vaut la peine parce que ça reste une expérience très riche. Et souvent, en fait, durant le parcours, on est découragé. Moi, je vois beaucoup de familles qui sont découragées, qui veulent rentrer dans leur pays d’origine. Mais la clé, c’est aussi la persévérance et de se poser la question. Qu’est ce qu’on veut?
C’est quoi notre désir? est-ce que notre désir de rester dans un pays qui nous adopte et de s’adapter et de pouvoir intégrer des nouvelles choses où on a envie de garder ce qu’on a appris durant notre parcours d’enfance. Donc voilà c’est un choix, il n’y a pas de bien, il n’y a pas de jugement à ce niveau mais moi ma vision c’est que ça permet à élargir la vision du monde Le monde ne se limite pas à notre pays, à notre famille, à notre personne. Et c’est très intéressant de pouvoir aller vers cette aventure. Comment on vit ?
À chaque fois qu’on voit ces sondages qui sortent, on voit une montée du racisme. Comment on vit dans un pays qui a ce racisme qui grandit ? Je remarque cette problématique chez les enfants que j’accompagne. J’interviens parfois dans les écoles, les collèges, et effectivement en fait le problème de racisme, ça s’amplifie malheureusement, et du coup pour cela parfois on intervient en animant des cafés des parents. pour sensibiliser les jeunes sur cette question de discrimination et dans notre monde il faut peut-être en fait actuellement il faut peut-être multiplier ces actions pour pouvoir rendre ces jeunes conscients de ces difficultés en fait parce que chacun vient avec une culture et du coup il faut tout le monde que même au travail on remarque ça en fait entre collègues en France voilà il y a beaucoup de personnes qui ont des origines différentes et du coup il faut qu’on s’adapte tous ensemble de la même manière et du coup ça c’est très difficile c’est très compliqué et ça gomme un peu l’individualité de chaque personne.
Et pourtant sur la radio des français dans le monde on le sait on est tous des citoyens du monde et on devrait peut-être un peu plus s’écouter et se tendre la main ce serait peut-être un peu utile. Et accepter la différence aussi de chaque personne. Accepter la différence et avancer ensemble avec nos différences, c’est une grande richesse, je trouve. En tout cas, si vous voulez contacter Yara Paradis Psaibes, j’essaie de le dire convenablement, tu tenais à ce que je tienne… Très bien, tu le prononcerais bien !
J’ai choisi de garder les deux noms de famille parce que voilà, je trouve le lien avec notre pays d’origine est important et ce que je souhaite transmettre aussi pour ma fille et voilà, pour son futur, pour rester connectée à ses origines, c’est important de rester dans cette filiation, dans cette transmission des valeurs et tout ce qui vient avec. Alors si cette interview a fait écho pour vous, vous avez le lien du site internet de Yara Paradis qui est présent dans le descriptif de ce podcast ou vous pouvez passer par la plateforme Expat Pro. Ma toute dernière question Yara, le 4 août 2020, t’es en train de partir en vacances, tu reçois un drôle de message de ta famille, raconte-moi, on rappelle que c’est le jour de l’explosion dans le port de Beyrouth. C’est une date qui a marqué tous les Libanais, que ce soit des Libanais au Liban, en France ou ailleurs. En fait, je partais en vacances et effectivement, j’ai reçu une vidéo qui montre l’explosion.
Et là, c’était très difficile à intégrer tout ça. Et même, je pense, jusqu’à maintenant, il y a beaucoup de familles, il y a beaucoup de personnes qui n’ont pas dépassé ce trauma qui est marqué à vie. et qui sera probablement, si ça ne sera pas travaillé, élaboré et que ça soit verbalisé, ça pourrait être transmis d’une génération à une autre. Donc effectivement, c’était très dur de travailler tout cela. Et là, j’aime conclure sur le fait que même nous, en tant que psychologues, on reste des êtres humains, on ne connaît pas tout, on peut avoir un parcours difficile et cette difficulté et ce travail sur cette difficulté et ces événements personnels, que ce soit traumatique ou pas, ça va nous permettre aider les patients, aider les jeunes, aider les familles à avancer dans leur propre parcours.
Donc le travail personnel des psychologues est essentiel dans cette démarche. Et on salue tous les Libanais du monde entier à travers cette interview. Bienvenue pour ce livret de nationalité que tu pourras brandir dans quelques heures et bois une petite coupe de champagne à ma santé. Merci beaucoup, c’est très gentil. À très vite, au revoir.
Merci, au revoir.
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