L’Expatriation des ados HPI : Paroles de Alexandra Milazzo, psychologue

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Comment l’expatriation influence-t-elle le développement des adolescents à haut potentiel intellectuel (HPI) ?
Dans le cadre du dossier spécial « Les Ados & l’Expatriation » proposé par Francaisdanslemonde.fr avec le soutien des experts d’Expat Pro et le parrainage d’Expat Student, le Spécialiste des candidatures pour les universités au Royaume-Uni, en Europe et au Canada, Gauthier Seys s’entretient avec Alexandra Milazzo, une psychologue spécialisée en neurosciences résidant en Suède.

Originaire de la Côte d’Azur, Alexandra a étudié à Nice, Bordeaux et Chambéry, et a également acquis une expérience en Angleterre. Installée en Suède depuis trois ans et demi avec sa famille, elle travaille principalement en ligne pour accompagner les expatriés du monde entier. Son expertise se concentre sur les adolescents à haut potentiel intellectuel, un sujet qu’elle aborde avec une approche scientifique et nuancée, loin des stéréotypes souvent véhiculés par les médias.

Cet épisode explore les défis et les opportunités auxquels font face les adolescents HPI dans le contexte de l’expatriation. Alexandra explique que le HPI n’est pas un trouble, mais une particularité de neurodéveloppement, et que chaque cas est unique. Elle souligne l’importance de ne pas voir le HPI uniquement comme un atout, car cela pourrait créer une pression inutile sur les jeunes. L’expatriation peut être une expérience enrichissante pour les adolescents HPI, offrant de nouvelles perspectives et apprentissages, mais elle peut aussi présenter des défis, notamment si l’intégration dans un nouveau système scolaire est difficile. Alexandra insiste sur l’importance d’un accompagnement personnalisé, prenant en compte l’environnement familial et culturel de chaque adolescent.

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https://www.linkedin.com/in/alexandra-milazzo-5162a695

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Chapitrage de l’épisode :

00:00:02 – Introduction et présentation du dossier
00:01:25 – Alexandra parle de Kristinhamn et de la statue de Picasso
00:02:46 – Spécialité HPI et l’impact des séries télévisées
00:03:58 – HPI: Définition et critères de diagnostic
00:05:20 – HPI: Atout ou trouble ?
00:06:40 – Difficultés possibles pour les enfants HPI
00:07:25 – HPI et l’expatriation: défis et avantages
00:08:48 – Études récentes sur la diversité des HPI
00:11:01 – Accompagnement psychologique pour les enfants HPI
00:12:39 – HPI: Un ado comme les autres ?
00:13:50 – Conclusion et remerciements
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Transcription de l’épisode :

La Radio des Français dans le Monde présente le dossier spécial Les ados et l’expatriation parrainé par Expat Students, le spécialiste des candidatures pour les universités au Royaume-Uni, en Europe et au Canada. Direction la Suède pour cette interview. Dans le cadre du dossier les ados et l’expatriation, on va parler des HPI au potentiel intellectuel. Alors que l’on connaît tous mieux en France depuis quelques années grâce à une série télé, j’aurais une question à Alexandra là-dessus. Alexandra Miladzo, psychologue depuis la Suède.
coincé entre Stockholm, Oslo et Göteborg. On va donc dans une ville que je ne connais pas. Bonjour Alexandra ! Bonjour Gautier ! Alors tu habites dans quelle ville ?
Fais-moi rêver ! Cite-moi le nom d’un meuble Ikea. Non, c’est pas le nom d’un meuble Ikea, mais ça viendra peut-être. Ça s’appelle Kristinhamn et c’est une ville qui est notamment connue pour avoir la plus grande statue de Picasso au monde. Ah bon ?
Ouais. Alors, on échange aujourd’hui dans le cadre de notre partenariat avec Expat Pro. Tu es psychologue spécialisé en neurosciences et on va parler de ce sujet des HPI. Ma petite blague sur la série télé. Est-ce que pour les HPI, c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle, cette série ?
Alors, pour tout te dire, la série, je ne la connais pas très bien. T’es pas en France, du coup. Oui, puisque maintenant, je suis en Suède, donc je préfère m’abstenir de donner un jugement sur cette série. Parce que parfois, ça met en avant un sujet, mais pas forcément sous un bon angle. C’est un peu les retours qu’on m’a donnés jusque là.
Ça caricature un peu, peut-être, ce qui est un HPI. Oui, en fait, le mieux, c’est de partir sur des recherches plutôt scientifiques ou des faits… Que sur une série de TF1. Oui, exactement, parce que du coup, ça peut amener à de fausses idées, des stéréotypes et c’est pas plus utile. Comme souvent lorsqu’un sujet est traité par la télévision.
Toi, tu es originaire de la Côte d’Azur. Tu as fait tes études à Nice, Bordeaux et Chambéry. Une petite expérience en Angleterre. Et depuis trois ans et demi, tu es en famille, installée donc en Suède avec trois enfants. Salut monsieur et les trois enfants.
Tu es à la place du conjoint accompagnateur. On a un excellent dossier si tu veux écouter des podcasts sur ce thème. Mais en l’occurrence, tu as pu te promener dans le monde avec ton métier sous le bras. C’est ça, c’est ça, tout à fait. Et donc aujourd’hui, tu proposes de pouvoir travailler en visio essentiellement.
Oui, alors aussi en présentiel en Suède et pour les expatriés qui habitent un petit peu partout dans le monde, en ligne, ça marche un petit peu mieux, c’est plus facile. Alors, grand sujet que l’on aborde sur notre antenne, les ados et l’expatriation. Pour commencer, pour planter le décor, c’est déjà bien de rappeler ce qu’est un HPI. Oui, donc haut potentiel intellectuel. Parfois, on entend parler de surdoué chez les enfants de EIP, Enfants Intellectuels d’Écosse.
Et en fait, c’est une bonne question de le définir parce qu’on y a un petit peu de tout dans les médias. Et on a eu l’impression récemment qu’on pouvait définir le HPI par des critères de comportement. Si on est très hypersensible, peut-être qu’on est HPI. Mais il y a une définition consensuelle, qui est la même dans le monde entier, qui est que lorsqu’on fait passer un test psychométrique standardisé, il faut que la personne ou l’enfant ait des scores supérieur de 2 écart-type à la moyenne, autrement dit un QI supérieur ou égal à 130. Donc ça c’est le critère de diagnostic et donc on l’évalue en faisant des tests standardisés qu’on appelle les tests de QI, de quotient intellectuel.
Alexandra, lorsqu’on est repéré HPI, est-ce que tu considères qu’on parle de troubles ou d’atouts pour l’enfant ? Alors, bonne question également. Tu m’as regardé avec un regard profond en disant oula ! Grand sujet, grande question. C’est un peu ça.
Non, alors ce n’est pas un trouble. Ce n’est pas un trouble. Et encore une fois, en lisant plein de choses dans les médias ou dans des séries, on peut avoir l’impression que c’est un trouble, mais ce n’est pas un trouble, c’est une particularité de neurodéveloppement. avec, comme je le disais tout à l’heure, il faut qu’il y ait un QI supérieur ou égal à 130. Mais c’est tout.
Donc c’est une particularité. Maintenant, il peut y avoir, lié à cette particularité, des troubles éventuellement associés. D’accord. Mais en soi, ce n’est pas du tout un trouble. Au contraire, on peut voir ça, effectivement, comme tu le dis, comme un atout.
Oui, pardon, mais quand il y a un mais, je laisse passer. Il y a priorité quand il y a un mais. Oui, il est important de le mettre, parce que si on envisage le haut potentiel intellectuel seulement comme un atout, on prend le risque, là aussi, d’amener de fausses idées, de dire bon, c’est un enfant qui est HPI, donc tout va être facile. C’est cool, hop, on va faire autre chose. Il va tout réussir, il va faire de grandes choses ou je ne sais quoi.
Et en fait, il ne faut pas amener les choses comme ça parce que du coup, ça peut créer une énorme pression sur l’enfant. Vous imaginez, on dit à un enfant, tiens, t’es surdoué. Alors déjà, le terme surdoué, d’accord. Qu’est ce que c’est? Je suis un génie.
Qu’est ce qu’il faut que je fasse? Voilà. Il peut aussi se poser toutes ces questions et néanmoins, ils peuvent quand même avoir certaines difficultés d’apprentissage parfois. notamment quand il y a un trouble spécifique d’apprentissage, comme par exemple la dyslexie. Il est possible d’avoir un HPI et une dyslexie ou un TDAH, etc.
Et quand c’est le cas, un enfant à qui on a mal expliqué ce que c’est que le HPI peut se sentir nul ou se dire mais ce n’est pas possible, je suis HPI, je devrais tout réussir facilement. Pas comme les autres. Voilà, ouais. Et du coup, ça peut créer un sentiment de décalage par rapport aux autres qui peut être vécu de manière, ça peut être vraiment très insupportable pour eux. Et il y en a qui, dans le pire des cas, se retrouvent en échec scolaire et désinvestissent parce que les représentations du HPI ont été mal expliqué quoi.
Et si on fait un focus spécifique par rapport à notre dossier sur les ados, les 12-18, est-ce qu’avec en plus une période où on s’ouvre un peu sur le monde, on se détache un peu de ses parents, est-ce qu’être HPI dans ce cadre-là, ça rend la chose plus difficile ? Alors ça peut, mais ça dépend des cas. C’est à dire que je ne peux pas répondre et dire ça va forcément être plus difficile. Non, pas du tout. Notamment dans le cadre de l’expatriation, par exemple, ça peut être en fait un plus pour un enfant ou un adolescent HPI parce qu’il va y avoir de nouveaux apprentissages, de nouvelles rencontres.
Ça peut être un challenge et quelque chose de positif. Mais si cet enfant, cet adolescent a du mal à s’intégrer à un nouveau groupe avec des camarades, si le système scolaire dans le Pays Haute a peut-être un niveau un peu en dessous, des exigences un peu moins élevées, il peut s’ennuyer. Et du coup, dans des situations un peu particulières, il peut sombrer en dépression, avoir plus d’anxiété, etc. Donc en fait, ça va vraiment dépendre de l’adolescent. Il y a toujours un peu de plus et un peu de moins associés, visiblement.
Oui, c’est ça. Et en fait, il y a des études récentes, très intéressantes sur le sujet, qui montrent qu’en fait, c’est pas une population homogène. Donc, c’est très hétérogène. Et donc, en fait, quand on fait un test de QI, il y a plusieurs domaines d’intelligence qui sont évalués. Donc, par exemple, le langage, les compétences langagières, le raisonnement au niveau du langage, la compréhension du langage.
Et il y a aussi ce qu’on appelle le raisonnement perceptif, le raisonnement logico-déductif, visio-spatial qui, lui, n’implique pas le langage. Donc, on va tester plein de domaines intellectuels. Et les études montrent que lorsque le score le plus élevé, quand on fait le test de QI, c’est au niveau du langage, ce qu’on appelle l’indice de compréhension verbale, eh bien ces enfants-là, ou ados, vont avoir plus tendance à être anxieux. Donc dans ces cas-là, c’est plutôt un facteur de vulnérabilité. A l’inverse, si le score le plus haut, c’est le raisonnement perceptif, non verbal, et bien là, au contraire, on montre que c’est plutôt un facteur protecteur par rapport à la population générale pour les affects anxieux.
Donc, c’est tellement hétérogène, il peut y avoir des scores plus ou moins élevés dans différents domaines. Parfois, ils ont un trouble associé.
Effectivement, on ne peut pas dire que c’est forcément un atout, c’est forcément un désavantage. En fait, il faut prendre au cas par cas. Je comprends bien, chaque cas est spécifique. Je suppose que lorsque les parents découvrent que leur enfant est HPI, c’est plus de la panique qui s’empare des parents ou de la quiétude ? Alors ça dépend.
Il y a des parents effectivement qui peuvent un peu paniquer parce qu’ils ont lu peut-être beaucoup d’articles sur le sujet en disant attention, ça va être des enfants qui vont plutôt avoir tendance à être isolés, à avoir des problèmes, alors que ce n’est pas forcément le cas. Ce n’est pas absolu. Non, ça va vraiment dépendre. Ça peut être le cas aussi, mais ce n’est pas une… Ce n’est pas une vérité en soi qu’être HPI va nécessairement être associé à des difficultés.
Ça peut être l’inverse. Et il y a des parents qui vont être soulagés. Ah bon, ben voilà, maintenant, je comprends un petit peu mieux pourquoi mon enfant est tel qu’il est et a des particularités. Et parfois même, les parents vont se découvrir eux-mêmes HPI à travers leur enfant. Ça, ça arrive assez fréquemment.
Est-ce que justement, les parents donnent le HPI à leurs enfants ? Mais des études qui le montrent ? Il y a des facteurs. Oui, génétique, après, c’est pas forcément héréditaire. Il peut y avoir des enfants qui ont un HPI, mais qui n’ont pas de parents qui sont concernés par le HPI aussi.
Si je comprends bien, il y a autant de situations d’ado que tu accompagnes. Il n’y a jamais de règle absolue. Et justement, évitons tous ces concepts. Je parlais de la série de TF1 pour commencer, mais justement, il faut sortir de ça parce que l’accompagnement que tu vas faire, il sera individualisé gamin par gamin. Complètement individualisé.
Et il ne faut pas oublier que quand on reçoit un adolescent ou un enfant, il évolue dans une famille. Il évolue dans un pays particulier. Là, en l’occurrence, quand on parle aussi d’expatriation et que tout ça, ça va influencer l’adolescent. On ne peut pas juste prendre le problème en regardant que l’enfant. On doit prendre en compte tout le contexte et la représentation d’un pays sur les enfants en général ou là, en l’occurrence, sur le HPI, va être différente aussi.
Et donc les stéréotypes, il y a ça aussi. Et tout ça, ça joue. Et ma dernière question, justement, du coup, Alexandra, lorsqu’un parent découvre que son enfant est HPI, tu peux l’accompagner en visio. Est-ce que le travail d’accompagnement est long ? Est-ce qu’il doit être soutenu répétitif ?
Il ne doit pas être forcément long, soutenu et répétitif. Il y a des situations où il n’y a pas besoin d’un suivi, où du coup, le HPI a bien été expliqué. Il n’y a pas de soucis à l’école ni au niveau familial. Donc, il n’y a pas besoin de consulter. Donc, ça, c’est très bien.
Il arrive qu’il y ait besoin de consulter. Et très souvent, je travaille avec les parents beaucoup, pas seulement avec l’adolescent. Et je donne des petits outils, des petites pistes qu’ils peuvent appliquer à la maison. Et parfois, en une ou deux séances, ça suffit. Ça dépend de l’intensité et de l’origine des problèmes.
Finalement, un HPI, c’est un ado comme les autres. Oui et non. C’est beaucoup oui et non avec toi.
Oui, mais du coup, on se rapproche un peu plus de la vérité, parce qu’il faut faire attention aux extrêmes, en fait, de toute façon. Et là, je pense qu’il faut donner des réponses un peu modérées. Donc, c’est un ado comme les autres, en partie, mais il a quand même des particularités. En fait, 2,2% des ados sont HPI.
Il y a une différence par rapport aux adolescents, entre guillemets, normaux, qui est évaluée par les tests de QI. J’ai horreur de ce mot, normal. J’ai horreur de ce mot. Je sais, mais en statistique… Je t’en veux pas.
Dans la moyenne, on va dire plutôt. Oui, d’accord, c’est vrai. C’est plus juste. Voilà. Il y a un écart par rapport à la moyenne.
Donc à ce titre là, ils ne sont pas exactement comme les autres. Néanmoins, ça reste des adolescents, des enfants.
Alexandra, merci pour cet éclairage. C’est bien d’en parler, en tout cas, je pense, comme beaucoup de sujets, ce qui peut être un peu angoissant. Dès qu’on en parle, ça va tout de suite beaucoup mieux. Oui, on se retrouvera pour faire ton portrait et parler de ton parcours, de ton travail de psychologue depuis la Suède. Merci d’avoir été avec nous aujourd’hui.
Merci à toi de m’avoir invité. les ados et l’expatriation en partenariat avec les experts du réseau Expat Pro. Dossier parrainé par Expat Student, le spécialiste des candidatures pour les universités au Royaume-Uni, en Europe et au Canada. expatstudent.fr.
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